KIBLIND 48

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48 PRINTEMPS 2014 CULTURE   VISUELLE   &  VISION   CULTURELLE  LEG© PUFFINS CETELEM CANARD PC BACON’N‘EGGS INFAUX MOOS-TANG CDI FELIX PFäFFLI GRATUIT kiblind.com

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Printemps 2014

Transcript of KIBLIND 48

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48

48

•printemps

2014

—CULTURE  VISUELLE  

& VISION  

CULTURELLE  

leg©puffinscetelem

cAnARD pcbAcon’n‘eggs

infAuxmoos-tAng

cDi

—felix

pfäffli

GRATUIT

kiblind.com

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Ix P

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Vue par Marion Fayolle

(3/ 4)

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� KRAFTWERK 3D

DARKSIDE • FOUR TET • TRENTEMØLLERGARNIER B2B MCDE • GOLD PANDATHE BRIAN JONESTOWN MASSACRE

FUCK BUTTONS • ROBERT HOODMARCEL DETTMANN

LEE RANALDO & THE DUSTKODE9 • AGORIA

MAN OR ASTRO-MAN ? BLACK LIPS • FLOATING POINTS

BRANDT BRAUER FRICKNINA KRAVIZ • DUM DUM GIRLS

DEETRON • DIXONWOODEN SHJIPS

TEN WALLS • THE EX • SHEDDANIEL AVERY • OPTIMO (ESPACIO) LA COLONIE DE VACANCES • RUSTIE

JIMMY EDGAR B2B BAMBOUNOU...

WWW.NUITS-SONORES.COM

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05

e n Co u v e rt u r eSans-titre (création originale)

de Felix Pfäffli

D'Étapes à Chaumont, en passant par i D‑Pure, Computer Arts, la Lucerne School of Graphic ou l'Alliance Graphique Internationale, le constat est formel : Felix Pfäffli est jeune et brillant. Mais, et comme dans tous les domaines, il ne s'agit pas que de fougue et de talent : le travail derrière est colossal.À ce travail de graphiste, Felix Pfäffli s'y donne corps et âme depuis sa première découverte des outils artistiques. Baignant dans une ville qui regorge de confrères, le Suisse n'a surtout pas attendu la fin de ses études pour commencer à réaliser posters, flys et affiches dont il est devenu depuis un expert connu et reconnu. Dès l'obtention de son baccalauréat, en 2009, il fonde son propre studio Feixen, avec lequel il répond encore aux sollicitations de ses nombreux clients. Le travail de Felix Pfäffli trouve en effet une résonance particulière chez les structures culturelles suisses, qui lui confient plaquettes et identité graphiques en masse. Mais Felix Pfäffli œuvre également pour l'amour de l'art. Car entre recherche et pra-tique, le graphiste suisse n'a jamais souhaité choisir et opte plutôt pour la combinaison des deux. Avide de nouveaux outils et par-tisan de l'expérimentation, Felix Pfäffli ne reste que rarement arcbouté sur les mêmes schémas, sur les mêmes techniques. Que ce soit pour des couvertures de magazine ou des travaux institutionnels, il cherche en permanence de nouvelles façons de créer. Prenant ses références ça et là dans le monde qui l'entoure, il brasse dans ses œuvres cette réalité multiple pour créer un tout nouvel alliage de formes, de couleurs et de textures.La couverture, qu'il a réalisée exclusivement pour Kiblind, est née de cela, de cette envie de transformer le réel en inconnu. Partant du peu ragoutant bacon, il lui donne une autre dimension et transforme sa matérialité pour en faire un objet esthétique, graphique et, surtout, hyper efficace. Pour Felix Pfäffli, c'est de l'expérimentation que naît l'art. Il a totalement raison.

felixPfäfflifeixen.ch

01 austra 02 salzhaus

03 hslu - Werkschau

05 Welt format

04 let get in on

06 mono tales

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LEG© corp.

1140 pièces

Fabriquées en 1 seconde

400 MillionsDe joueurs

130 paysConcernés

53 couleursDe briques

1

2 3

4

53e

Fabricant mondial

de jouets (Chiffre d'affaires)

2,15 Mds € De chiffre d'affaires

1932Création de l'entreprise

2013Première figurine Lego

dans l'espace

1957Forme finale et actuelle

de la brique

1964Premières

notices d'utilisation

dataSujet : J. MartinezGraphisme : Anaïs Berthelot & Alexis Sadowski

Ole Kirk Christiansen est un Danois de la petite ville de Billund, qui aime la menuiserie et les jouets. Un jour ensoleillé de 1932, il hurle nu face au vent « Leg Godt » ("joue bien" dans sa langue natale), et jette une belle

brique dans la marre aux jouets. Le Lego de bois laisse rapidement sa place à son descendant de plastique et marquera à tout jamais les samedis après-midis des petits et grands enfants. Après une petite crise à la fin des années 90 suite à la péremption du brevet, le petit bonhomme jaune se redresse et hisse fièrement son étendard, jouant des licences, événements et autres parcs à thème. Les dernières briques de son empire, désormais 3e au classement des plus grands fabricants de jouets : un lego pour les filles (poliment appelé Lego Friends) et un film fendard sorti en février (La Grande Aventure Lego). Quelques concurrents tentent bien de perturber cette belle succes story, sans réussite pour le moment. C'était sans compter sur la révolution « imprimante 3D » et sa philosophie open source offrant à qui veut, la possibilité de s'imprimer ses legos pour l'occasion.

0607

é d i to - s o m m a i r eTexte : M. Sandjivy

« J'ai pris quelque chose que j'aimais et j'ai testé. »Felix Pfäffli, à l'image de ses contemporains, détourne, combine et transforme notre réa-lité grâce au numérique. Une tendance ac-tuelle et un triptyque qui peuvent se décliner à l'infini et au-delà.

Détourner…La page web du Gorafi a forcément piégé une personne de votre entourage. Cette bande de joyeux lurons parodie l'actualité, depuis bientôt 2 ans, avec un talent certain. Une lutte par l'absurde contre la désinformation proposée par les médias.

…Combiner…Nordique, l'entreprise de fabrication de jouet LEGO a su surfer la vague numérique depuis 2003, année où elle subit un recul de 25 % de son chiffre d'affaires. Les petits bonshommes s'animent à la télé, en jeux vidéo, puis au ciné-ma. 10 ans plus tard, alliée à Disney, la firme danoise est le deuxième producteur mondial de jouet devant Hasbro et derrière Mattel.

…Transformer…L'essai de printing 3D pour des vêtements ou accessoires est à la mode. Cette technologie dont les applications sont principalement militaires et médicales trouve actuellement sa place dans la création textile. Le procédé coûte encore un peu cher et nécessitera sans doute un crédit à la consommation, mais qu'importe : imprimer une paire de chaus-sures sur mesure chez soi, CETELEM-ment bien !

…C'est ainsi qu'une tranche de bacon a terminé, ou commencé, sa vie en première page de

couverture.Et c'est dejà pas mal.

data

08—

leg©

P o rt r a i t

15—

canard Pc

PaG e s B L a n C H e s

21—

Maurice van eS 22

ToMa duTTer 23

ian Snyder & ayMrc 24

jéréMie FiScher 25

roberTo la Forgia 26

PeTer STeineck 27

TiMoThy hunT 28

gaël darraS 29

vicTor huSSenoT 30

gino bud hoiTing 31

guy yanai 32

charleS nogier 33

STAff

Directeur de la publication :Jérémie Martinez

Rédacteurs en chef :Jean Tourette - Gabriel Viry - Jérémie Martinez

Rédacteur en chef Mode :Baptiste Viry

Rédaction Kiblind : Maxime Gueugneau - Gabriel Viry - Jean Tourette - Jérémie Martinez - Olivier Trias - Simon Bournel-Bosson - Matthieu Sandjivy - Marlène Cottin.

Cahier Mode : DA / Baptiste Viry - Assistante / Alizée Lagé Photographe / Moos-Tang - Styliste / Alix Devallois

Relecture : Frédéric Gude

Merci à : Baptiste Alchourroun - Anaïs Berthelot - François Huguet - Alexis Sadowski - Basil Sedbuk - Pierre Serafini - Robin Thomas.

Direction artistique : Agence Klar (www.agence-klar.com)

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r e v u e d e P r e s s e

10—

PuFFinS

r é C L a m e

12—

ceTeleM

r e P o rtaG e G r a P H i Q u e

16—

leS avenTurierS du Fauve d'or

d o s s i e r

34—

uSage de Faux

C d i

55—

anTiciPaTion 55

biblioThèque 56

chercheur 57

cockTail 58

C a H i e r m o d e

41—

kxM-T

cuMuloniMbuS 59

élecTron 61

éPiderMique 62

exTravaganceS 63

nickel 64

PaTTe 65

Sang 66

iNfOS

Le magazine Kiblind est imprimé par :DEUX-PONTSManufacture d'histoires - 5, rue des Condamines38320 Bresson - www.deux-ponts.frIl est édité à 40 000 exemplaires par Kiblind Édition & Klar Communication. SARL au capital de 15 000 euros - 507 472 249 RCS Lyon .

Kiblind Magazine - 27 rue Bouteille - 69001 Lyon 04 78 27 69 82 - www.kiblind.com Le magazine est diffusé en France (à Paris, Lyon, Marseille, Montpellier, Bordeaux, Toulouse, Rennes, Nantes, Lille, Strasbourg, etc.) et à Bruxelles. Ce numéro comprend un cahier supplémentaire de 28 pages pour la région Rhône-Alpes.

ISSN : 1628-4146 // Les textes ainsi que l’ensemble des publications n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Tous droits strictement réservés. THX CBS. « Arrêtes ! Tu bacon Francis ! »Contact : [email protected]

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leG© cOrP.

1140 Pièces

fabriquées en 1 seconde

400 Millionsde joueurs

130 Paysconcernés

53 couleursde briques

1

2 3

4

53e

Fabricant mondial

de jouets (chiffre d'affaires)

2,15 Mds €de chiffre d'affaires

1932création de l'entreprise

2013Première figurine lego

dans l'espace

1957Forme finale et actuelle

de la brique

1964Premières

notices d'utilisation

dataSujet : j. Martinezgraphisme : anaïs berthelot & alexis Sadowski

Ole Kirk Christiansen est un Danois de la petite ville de Billund, qui aime la menuiserie et les jouets. Un jour ensoleillé de 1932, il hurle nu face au vent « Leg Godt » ("joue bien" dans sa langue natale), et jette une belle

brique dans la marre aux jouets. Le Lego de bois laisse rapidement sa place à son descendant de plastique et marquera à tout jamais les samedis après-midis des petits et grands enfants. Après une petite crise à la fin des années 90 suite à la péremption du brevet, le petit bonhomme jaune se redresse et hisse fièrement son étendard, jouant des licences, événements et autres parcs à thème. Les dernières briques de son empire, désormais 3e au classement des plus grands fabricants de jouets : un lego pour les filles (poliment appelé Lego Friends) et un film fendard sorti en février (La Grande Aventure Lego). Quelques concurrents tentent bien de perturber cette belle succes story, sans réussite pour le moment. C'était sans compter sur la révolution « imprimante 3D » et sa philosophie open source offrant à qui veut, la possibilité de s'imprimer ses legos pour l'occasion.

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3e

Fabricant mondial

de jouets (chiffre d'affaires)

1998l'entreprise connaît

une crise économique

1958dépot du premier brevet

1988Péremption du brevet

22concurrents directs

6 Parcslegoland

dans le monde

62briques par habitants

sur Terre

40 Millions

de briques pour relier

la Terre à la lune

7%des parts sur le marché

mondial du jouet en 2013

15 000briques open source

réalisées aux ateliers

"open bidouille camp"

60%du chiffre d'affaires

est représenté par la

diversification (licences, jeux

vidéo, vêtements…)

2001restructuration

de l'entreprise

550 euros

Prix du Falkon Millennium

composé de 1254 pièces

34 Mètres

la taille records d'une tour

faite en brique

300

évènements à l'échelle mondiale

(expositions, salons, concours,

inaugurations…)

5 922briques composent

le jouet du Taj Mahal

915 103 765

Soit le nombre

de combinaisons possibles

avec 6 briques

1x

2x

3x

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01. BiScOTO n°14 Mars 2014biscotojournal.com

02. creATiVe reVieW Mars 2014www.creativereview.co.uk

03. iNferNOn°2 Printemps 2014inferno-magazine.com

« Si vous aimez vraiment quelque chose dans votre vie, dites-le à quelqu'un. Que ce soit une blague, une image, une chanson, un film. C'est tout sim-plement faire du monde un meilleur endroit. » 04 Ce conseil, je l'ai entendu une fois dans une boîte de Montréal. Je sais pas trop pourquoi, ça m'est resté dans la tête. Étant actuellement en phase dépressive – ça m'arrive tous les trois mois, à peu près – , j'ai choisi de me charger en bonne conscience et de participer moi aussi à la bonne santé du monde. Et mon truc à moi, c'est le combat de puffins.Je ne sais rien faire de mes mains et pas grand chose de ma tête. « Soit l'homme est créatif, soit il ne l'est pas du tout. La création est quelque chose qui se manifeste tout au long de la vie. » 06. Personnellement, j'ai très peu d'ima-gination. J'ai bien essayé de tomber amoureux, mais même ça, ça n'a pas vraiment marché. Alors, conscient du vide sidéral qu'allait être ma vie, j'ai fait comme tous les autres ratés : je me suis trouvé une passion.Je vis dans un trou au fin fond du Québec, qui ne survit que grâce au Saint-Laurent. « Épine dorsale de la "Belle Province", le Saint-Laurent est une "veine" dont l'existence a orches-tré toute l'histoire humaine et maritime du Québec, voire de l'Amérique. » 09 Chez nous, il continue encore à le faire, mais faut croire qu'on a dû insulter sa famille, parce qu'il est plus très chari-table ces temps-ci. Je travaille pour la compagnie de ferries qui fait l'express

jusqu'à Rivière-du-Loup. « La ligne n'est pas rentable. Il faudrait faire payer les billets bien plus cher pour que la compagnie gagne de l'argent. Or, c'est impossible, car les passagers ap-partiennent aux classes les plus pauvres et les plus délaissées du pays. » 09 Je vais sans aucun doute me faire virer d'ici pas tard, mais de toute façon, c'est pas avec ce que je gagne… Bref, reve-nons à nos puffins.

« Oui, c'eST PrOBABleMeNT l'eNdrOiT du MONde Où leS GeNS SONT le PluS cONS. »metaluna,

janvier-Février 2014

J'entends ceux qui disent qu'« on a ten-dance à regarder la nature et les ani-maux comme des ressources que nous pouvons utiliser plutôt que des com-pagnons dans un large système écolo-gique durable. » 07 « Cela peut gêner, je comprends, le manque d'humani-té » 03 à faire se battre des oiseaux juste pour le plaisir pervers d'une bande de mecs saouls. Dans ma situation, je ne pouvais guère faire autrement. Vous savez quel prix ils paient pour voir des yeux arrachés, des pattes tranchées et du sang, beaucoup de sang ?Cher. « Oui, c'est probablement l'en-

PRENDRE LA PRESSE POUR CE QU’ELLE EST : UNE SOURCE D’INFORMATIONS ET D’INSPIRATIONS. PROFUSION DE SAVEURS DE NOS PARUTIONS NATIONALES, SOUS LA FORME D’UN COURT RÉCIT, RÉSULTAT DU FUMET DÉGAGÉ PAR NOS LECTURES.

PuffiNSr e v u e d e P r e s s eTexte : M. gueugneau

1011

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droit du monde où les gens sont le plus cons. » 05. Et j'en profite. D'autant plus que la mise de départ est minime. Dans un coin comme le mien, la morale c'est : « pas d'argent ? pas de problème – c'est pas ça qui vous empêchera de faire des choses incroyables. » 02 Une chance pour moi, « les puffins ne bâtissent pas de nids : ils prospectent tout l'hiver pour trou-ver une cavité, une anfractuosité dans laquelle la femelle dépose, dès le mois de mars, son unique œuf annuel. »09 Je les chope à ce moment-là, gratos, et je les revends ou les élève si je vois qu'ils ont du potentiel. Ça me fait grosso modo 100% de marge.De toute façon, c'est pas la mort cruelle de trois bestioles qui va réfrigérer la banquise. Et puis, si on prend un peu de recul, « l'univers entier n'est rien de plus qu'une sorte de version céleste des Sims avec de très, très bons gra-phismes. »08 Nous sommes des per-sonnages, il ne reste qu'à jouer notre partition, et j'ai enfin trouvé la mienne. « Je pense que ça vient tout simplement de ça, je sais vers quoi je veux aller, ce que je veux représenter et rendre comme image. » 04 Attention, je suis pas le genre de gars à me la raconter genre « je suis le dernier gladiateur de Rome. Je rentre dans l'arène et je me bats contre la destruction. » 08 Non, je suis humble, besogneux, méticuleux. « Me mettre dans le rôle de l'artisan, c'est exactement ce qu'il me fallait. » 06 Comme ça personne se méfie, et tout le monde me file son blé.Mais il y a surtout, dans le combat de puffins, quelque chose de quasi mys-tique. Quelque chose dans l'air d'inex-plicable, renforcé par l'éclusion d'une centaine de bières à la minute. C'est comme si les gens naissaient une se-conde fois. « De public passif, consom-mateur d'images, une transformation s'opère : le regard est happé, l'oreille aussi, l'odorat, les sens s'éveillent, impossible de s'assoupir, le corps et

l'esprit sont assaillis de stimuli de toute part. » 03. La poussière, le sang et les plumes remplissent la pièce en un ins-tant et créent une sorte de cocon im-monde. Dans les plus grands combats, « des formes fantastiques émergeaient un instant de ce brouillard poudreux. Plus aucun repère, juste une impres-sion de flottement et de solitude dans un monde devenu onirique. » 06 Ces connards de hippies pourront prendre toute la drogue qu'ils veulent, ils n'arri-veront jamais à un moment d'extase pareil. Ces réunions prirent fin assez soudainement à cause d'une femme.

« Valérie, 25 ans, appartient à la bonne société de province. Une société que matérialise bien un père et une belle-mère qui ne la comprennent pas. » 05 Il faut dire que sa passion à elle, c'était l'alcool. Et en second, les puffins. Dès son premier combat, elle a tout fait merder. Moi, j'étais plutôt attendri par sa jeunesse, et puis c'était un peu mon élève. « C'est bien de trouver le temps de regarder le travail des étudiants. On sait jamais, il se peut qu'un jour on voie quelque chose d'impressionnant. » 02 Ce jour-là, ce que j'ai vu était effective-ment impressionnant. Elle a commencé par perdre. Puis elle a bu. Comme on dit : « l'essence du style nordique, c'est la simplicité. » 07 Elle s'est donc sim-plement mise à draguer ses adversaires. Puis tout aussi simplement, « elle en frappa un à coup de pied, fonça sur d'autres avec un bâton » 01 et se man-gea une quinzaine de poings dans la tête. Sa mort attira l'attention de la presse locale, puis celle des autorités qui firent mine de découvrir avec effroi nos pe-tites rencontres et fermèrent tout ce bazar. J'en pris pour mon grade – 3 ans exactement. C'est aussi ça, la passion.

reTrOuVeZ lA SÉlecTiONeN dÉTAil Sur WWW.KiBliNd.cOM

04. JAcKer MAGAZiNe

n°7 hiver 2014

www.jackermag.com

05. MeTAluNAn°6

janvier-Février 2014 www.metalunamag.com

06. MixT(e)n°7

Printemps-été 2014www.mixtemagazine.com

07. Mr.WOlfedition two

janvier 2014mrwolfmagazine.com

08. SMiTH JOurNAl n°9

été 2014www.smithjournal.com.au

09. THAlASSA n°3

hiver 2014www.france3.fr/emissions/

thalassa

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r é C L a m eTexte : j. Tourettevisuels : © ceTeleMpar l'agence TbWa

1213 L

orsque l’on se figure le concept de « mascotte », on imagine généralement un personnage,

un objet ou un animal, dont les carac-téristiques et l’apparence renvoient immédiatement au produit ou au ser-vice qu’il est censé représenter. Du tac au tac, quand il s’agit d’un homme en pneus pour une célèbre marque cler-montoise de pneumatiques, d’un écu-reuil pour de l’épargne, ou d’un ham-burger sur pattes pour une enseigne de fastfood. Certes, il arrive que ce soit moins spontané : un lapin rose pour des piles, un ours bleu pour du gaz, un géant vert pour des petits pois ; pour-tant on arrive tout de même à identi-fier quelque chose de connu. Mais par-fois, on ne comprend tout simplement pas ce qui s’est passé. En effet, privée de tout contexte, que pourrait bien symboliser une forme humanoïde verte à grosse tête, qui n’est pas un animal répertorié, pas plus qu’un objet usuel, à la texture hésitante entre la moquette et la pelouse, dont la constitution inté-grale ne donne pas l’ombre d’une piste représentative ? En clair : quel rapport peut-il bien y avoir entre la mascotte de Cetelem et le « crédit responsable » ?Si ce personnage parfaitement indéfi-nissable a beaucoup intrigué et conti-nue d’étonner dix ans après sa création, il n’en demeure pas moins qu’il assure brillamment son rôle symbolique de médiateur entre la marque et le pu-

blic : aujourd’hui, 90 % des Français le reconnaissent et 86 % l’attribuent à Cetelem. Comme quoi, une bonne publicité et l’affaire est dans le sac.

La grande ingéniosité dont a fait preuve Cetelem, bien au-delà des traits de son icône, est de s’être dotée d’une mascotte pour matérialiser l’immatériel. « Le crédit est un produit complètement intangible, explique Mylène Deray, Responsable Marque et Publicité de Cetelem. Par conséquent, lui donner corps avec un personnage lui permet d’exister, de prendre vie, d’avoir un visage. Et en termes de communication, cela favorise le travail sur la mémorisa-tion et sur l’attribution à une marque. » Issu du latin credere (croire), le crédit est avant tout un acte de confiance fon-dé sur la croyance, sur l’impalpable. En France, le sujet est « sensible », car à la différence des Anglo-Saxons, la population est plutôt épargnante et peu confiante en ce dispositif. Aussi, si les Français accordent peu de cré-dit au crédit, les acteurs du secteur se doivent d’être particulièrement inno-vateurs. « L’idée de la mascotte venait de notre agence, TBWA. Tout le monde n’était pas convaincu au départ, puis sous l’impulsion du directeur de la communication, Bertrand Cizeau, il a été convenu de lancer les investiga-tions sur ce terrain. » Début 2004, les recherches ont donc débuté pour trou-

le BONHOMMe de ceTeleMLE PERSONNAGE FêTERA EN 2014 SES 10 ANS, MARQUÉS PAR UN SUCCèS ÉCRASANT SUR LE SECTEUR DU CRÉDIT. POURTANT S’IL NE SUFFIT PAS « DE RESSEMbLER à CETELEM POUR FAIRE DU CETELEM », à QUOI RESSEMbLE à SON TOUR CETTE MASCOTTE INDÉFINISSAbLE ?

05

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ver ce personnage qui accompagnerait la politique de « crédit responsable » que souhaitait lancer l’entreprise.En six mois, plus de 250 silhouettes ont été dessinées. « On a défini les éléments qui devaient caractériser le personnage et on les a testés : il y a eu des tables rondes avec des consommateurs, des clients ou non de Cetelem, des utilisa-teurs de crédit ou des réfractaires, et aussi en interne. On a voulu embar-quer toutes les sensibilités pour créer le personnage le plus consensuel pos-sible. » À l’issue de ce travail (01 >04), les caractéristiques de la mascotte devaient être fixées dans le marbre : a) la cou-leur : verte, avec un « C » rouge sur le torse, pour reprendre les couleurs du logo Cetelem de l’époque ; b) la forme : ronde, bombée, attachante ; c) la tex-ture : soyeuse, douce, rassurante (sans être véritablement de la moquette ou de la pelouse, comme on peut le penser aujourd’hui !) ; d) l’expression : sou-rire accorte, regard bienveillant, tout en restant muet ; e) la physionomie : pas d’oreilles, pas de cheveux, pas d’orteils, quatre doigts par main, une taille fixe de 90 cm ; f) le sexe et l'âge : ni homme, ni femme, ni enfant, sans sexe et inca-pable de se reproduire, donc unique ; et g) il n’a pas de nom ; et même si certains bruits de couloirs l’appellent officieuse-ment « Credito », la marque a tenu à ce qu’il n’ait pas de patronyme défini : c’est « le Bonhomme vert de Cetelem ».Ainsi modelée 05, la mascotte fait sa première apparition à la télé en sep-tembre 2004, incrustée graphiquement dans un film baptisé en interne « le film-batterie ». La scène prend place dans la rue, où un jeune homme et le petit bonhomme vert trottinent d’un pas enjoué sur l’air de Santa Cruz de The Thrills. Ils s’arrêtent devant un magasin de musique et le jeune montre du doigt une batterie flambant neuve trônant dans la vitrine. C’était bien là son intention : il a besoin d’un crédit pour se payer son instrument. Le petit personnage vert acquiesce d’un sourire et le laisse entrer dans la boutique ; ils en ressortent logiquement quelques ins-tants plus tard avec la batterie sur le dos (du bonhomme). Poursuivant leur

route, le jeune homme stoppe subite-ment devant une autre vitrine, recelant un piano bariolé. Se tournant alors en direction de son comparse avec l’inten-tion de lui demander un bis, il est cette fois accueilli par la négative. Et le mes-sage retentit : « Parce que c’est parfois dans votre intérêt, le crédit Cetelem sait aussi dire non s’il le faut ».« D’un point de vue marketing, ça a été un moment fort dans l’histoire de l’en-treprise, poursuit Mylène Deray. Car en l’espace de 30 secondes à l’écran, on allait affirmer que Cetelem ne disait pas systématiquement " oui ", n’accordait pas un crédit n’importe comment. Et le personnage est venu accompagner cette direction " responsable " et l’incarner dans la communication. »

En 10 ans, le bonhomme n’a pas évo-lué d’un iota. La publicité, quant à elle, a complètement changé et innové à son tour. À partir de 2011, on note les débuts d’une stratégie de commu-nication offensive, moins attendue et beaucoup plus drôle, à travers la « Saga des imitateurs »06 : l’homme-pelouse, l’homme-post-it et ses camarades sosies, l’homme-tricot, sans compter celui qui demande à son chirurgien de lui changer le visage… tous cherchent à égaler la mascotte de Cetelem, mais n’y parviennent pas. Le ton est donné, cinglant : « Il ne suffit pas de ressembler à Cetelem pour faire du Cetelem ! ». La campagne plaît énormément. Et les indices de notoriété, d’attribution et d’agrément grimpent, alors même que le personnage – le vrai ! – n’apparaît plus véritablement dans les spots, si ce n’est en signature de marque à la fin. C’est alors bien l’humour, l’ingénio-sité des faussaires et, derrière eux, des publicistes, que le public vient vérita-blement saluer.

D’ailleurs, les idées s’exportent au-delà des films. Car quelques mois en arrière, le 13 octobre dernier, un particulier proposait d’acquérir sur leboncoin.fr un costume du bonhomme qu’il avait confectionné lui-même… Peut-être pour une fête d’anniversaire ?

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P o rt r a i tTexte : o. Trias

visuel : canard Pc

15

DÉjà PLUS DE 10 ANS QUE LE MAGAzINE CANARD PC NE CESSE DE SE DÉMAR-QUER AU MILIEU D'UNE PRESSE jEU VIDÉO QUELQUE PEU MORIbONDE. ENTRETIEN AVEC IVAN GAUDÉ, UN DES MEMbRES FONDATEURS, POUR QUI L'INDÉPENDANCE DE LA PUbLICATION EST UNE PROFESSION DE FOI.

Le préquel de la saga Canard PC ramène à l'été 2003, lorsque le groupe Future (devenu Yellow Media) rachète le célèbre magazine Joystick au groupe

Hachette. Aussi sec, la majorité de la rédaction lâche les manettes et, s'en va commencer ailleurs une nouvelle par-tie. Ivan raconte : « On a refusé de travailler pour les nou-veaux proprios. On les connaissait bien puisqu'ils étaient nos concurrents depuis plusieurs années. On savait très bien comment ils travaillaient, comment ils concevaient la presse, notamment les relations avec les éditeurs de jeux vidéos. Chacun savait qu'il ne pourrait pas continuer à faire ce qu'il aimait dans ces nouvelles conditions. C'était presque épider-mique. » Pas de compromis lorsqu'il s'agit de convictions. Ivan Gaudé (Ivan le Fou), Jérôme Darnaudet (Lord Casque Noir), Olivier Péron (Ackboo), Pascal Hendrickx et Michael Sarfati réunissent alors leurs indemnités de licenciement et leurs économies pour fonder la société d'édition Presse Non Stop, qui donnera naissance à Canard PC. Le modèle éco-nomique imaginé à l'époque ? « C'était aussi simple qu'aber-rant. C'était qu'on allait vivre de nos ventes… (rire). Comme on était une bande de journalistes, et pas du tout une bande d'entrepreneurs ou de commerciaux, on avait tout basé sur le fait de créer un journal qui vivrait de ses lecteurs. » Aussi logique qu'à contre-courant, le canard mise donc sur ses compétences et s'en remet davantage à ses plumes qu'à la publicité, qui apportera « seulement du beurre dans les épinards. » C'est que la rédaction de Canard PC, avec ses critiques subjectives et non-consuelles, alliées à un humour subtil et grinçant, est une incontestable valeur ajoutée. Et trois changements d'équipe en 10 ans n'auront pas sacrifié cette marque de fabrique. « Ce sont des gens qui viennent de tous bords, qui ont une curiosité très variée, qui ne sont pas à 100% jeux vidéos, et c'est ce qui fait la spécificité du magazine et permet d'apporter un peu de sang neuf et de décalage au fait de faire de la presse de jeux vidéos. Les trois fondateurs restants sont aussi les garants de l'esprit qui prévalait à la création du magazine. »

Malgré l'émergence du web et des nouvelles pratiques quo-tidiennes des lecteurs, la priorité pour Canard PC reste de-puis toujours le support imprimé : « Le papier c'est ce qu'on sait faire, on l'a fait pendant longtemps avant Canard PC.

Le web ce n'est pas notre truc. On a un site, parce que c'est absolument indispensable et qu'on n'est pas réfractaire, mais le modèle de la presse en ligne gratuite 100% financée par la pub, philosophiquement, il ne nous plaît pas. » Et les désormais 25 000 exemplaires vendus à chaque numéro ne le contredisent pas. La recette a aujourd'hui du succès. « On est à rebours de la presse papier normale. Tous les ans les ventes de Canard PC augmentent ».Si l'évolution progressive du support, passé d'un 32-pages hebdomadaire à un magazine bimensuel de 80 pages, a lar-gement contribué à la progression du titre, nul doute que le développement fulgurant de Steam, la plateforme de distribu-tion en ligne de jeux vidéo, et la fertilité des productions indé-pendantes, ont aussi donné un nouvel élan à l'intérêt pour le combo souris/clavier. Mais pour Ivan Gaudé, la réussite et la longévité de Canard PC symbolisent surtout « l'aboutis-sement d'une réflexion sur la presse, son statut, ses limites, et sur la façon dont une équipe peut fonctionner sans être ni à la merci des annonceurs ni à la merci d'une hiérarchie, qui a d'autres impératifs que seulement plaire aux lecteurs. »L'indépendance avant tout.

canard pc exiSTe AVANT TOuT eN PAPier…

SiNON WWW.cANArdPc.cOM

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2014

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r e P o rtaG e G r a P H i Q u eTexte : M. gueugneauvisuel : S. bournel-bosson

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pag e s b l a n c h e s

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— Maurice van es

sans-titre (inédit)

mauricevanes.nl

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— TOMa DuTTer

Rochers suspendus

tomadutter.com

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— ian snyDer & ayMrc

The floor is Jelly - Cover for the game's OST

ianiselsewhere.com — aymrc.blogspot.jp

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— JéréMie Fischer

Sans-titre (Création originale)

jeremiefischer.com

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— rOberTO La FOrgia

Bacon Landscape (Création originale)

laforgiaworks.blogspot.it

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— PeTer sTeineck

Sans-titre (Création originale)

petersteineck.tumblr.com

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— TiMOThy hunT

Rocks (Création originale)

ficklefate.co.uk

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— gaëL Darras

de structura (Création originale)

gaeldarras.fr

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— vicTOr hussenOT

Bonneillus (Création originale)

victorhussenot.com

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— ginO buD hOiTing

sans-titre (Création originale)

ginohoiting.com

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— guy yanai

Plant, Banana, and a Painting (Création originale)

guyyanai.tumblr.com

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— charLes nOgier

Jardin de pierres (Création originale)

charlesnogier.wordpress.com

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d o s s i e rTexte : G. ViryVisuel : Baptiste Alchourroun

usage De FauXLes fausses informations sont-eLLes une source de jeunesse dans un océan médiatique qui manque parfois de buLLes ? eLLes ont tra-versé pLusieurs fois L'atLantique et Leur succès en dit souvent pLus Long que Les fous rires soLitaires en partage de connexion. décryptage…

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«L'Inspection du Travail arrête un homme qui orga-nisait 17 réunions par jour » (Le Gorafi) ; « 2 % des accidents de la route causés par les publicités Matmut

avec Chevallier et Laspalès » (Le Courrier des Echos) ; « Un hipster s'étouffe à mort en boutonnant sa chemise jusqu'en haut » (Bilboquet Magazine). Depuis quelques mois, les fausses informations font un carton sur le web et les réseaux sociaux. Entre humour parodique et contre-journalisme, la pratique n'est pas nouvelle, mais les sites « d'infaux » lui ont donné un nouveau sursaut, bien au-delà des pastiches de journaux. Deux ans après sa création, Le Gorafi est consulté, chaque mois, par un million de visiteurs et atteint régulière-ment des sommets, en particulier lorsque ses trouvailles sont

reprises pour argent content. Christine Boutin, par exemple, s'est répandue dans les médias, au sujet de la loi famille, en dénonçant la « stratégie provisoire d’avancement à potentia-lité différée » du gouvernement. Un peu plus tôt, l'agence de presse italienne et le Corriere della Serra avaient déjà relayé, sans rire, un faux sondage : « 89% des hommes français pen-sent que le clitoris est un modèle de Toyota ». Les exemples sont nombreux et, en pareil cas, la fausse nouvelle tourne forcément à plein régime, bien au-delà de son potentiel viral initial. « Nos articles ne sont pas repris par erreur, car il n'y a pas d'ambiguité sur le fait qu'ils soient faux », nuance Matthieu, l'un des auteurs de Bilboquet, lancé à la même pé-riode que Le Gorafi. Cela étant, le site dépasse régulièrement les 500 000 visiteurs mensuels, avec un esprit aussi impro-bable que le petit cadeau qu'il nous apporte en interview : un paquet de Kango. Son contenu le plus populaire reste d'ailleurs un portfolio détonnant : « 10 incroyables photos de parpaings à voir avant de mourir. » Tout s'explique un peu plus haut et entre deux rangées de gâteaux : « Nous per-dons notre temps pour mieux occuper le vôtre… » Les trois compères, basés respectivement à Paris, Rome et Vientiane, ne sont pas les seuls. De nombreuses pépites sont venues progressivement compléter la constellation française de l'in-faux, générant un flux de fausses nouvelles quotidiennes et une sorte de réalité parallèle à chaque débarquement sur les réseaux sociaux. Qu'ils soient généralistes (Le Courrier des Échos, le Bourbier international, l'Agence France Presque) ou thématiques (Football France, Darons, Veux Jidéo), ces nouveaux médias sont généralement des initiatives isolées, inspirées par le succès du Gorafi et réunissant, chacun, plu-sieurs milliers d'internautes. Après avoir créé plusieurs pages virales à succès sur Facebook (130 000 J'aime, c'est dire, pour "Ce soir, je suis Jack Daniels, demain, ce sera Dolly Prane"), Stéphane, informaticien de métier, profite de ses communautés virtuelles pour lancer Le Courrier des Echos (CdE). Comme les autres, il s'agit d'une sorte de vrai-faux journal, dans lequel un lanceur de pitbull décède des suites de ses morsures ou une habitante de Limoges porte plainte contre Red Bull, car son mari s'est défenestré (sans ailes). « Tout est fait pour donner l'impression, en lisant vite, que les informations sont réelles, images à l'appui », comme ce formidable tatouage de Nadine Morano dessiné, par erreur, sur le dos d'une fan de Maurane. « 90% de la fréquentation du site vient de Facebook. Selon la viralité des contenus, l'audience moyenne se situe entre 300 000 et 400 000 visites chaque mois ». Chez Darons, l'initiative est plus collective et s'attèle à détourner l'information parentale, avec des his-toires à peine plus improbables que celles rencontrées sur les forums spécialisés : « La nounou fait écouter Zaz aux enfants, elle risque 3 ans de prison », « Une vache géné-tiquement modifiée produit du lait maternel… » « On a commencé à écrire des articles, avec une bande de copains, en se moquant d'une presse que nous connaissions bien. »

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L'équipe conçoit même des fausses couvertures de maga-zine, avec des conseils précieux sur fond de bébé Évian : « 20 recettes pour cuisiner son placenta. »Ainsi se déploie la pratique des fausses nouvelles sur le web français, qui tient aussi bien du phénomène de mode que de l'extrapolation 2.0 d'une culture médiatique lointaine. À l'instar du Gorafi, le succès semble notamment s'expliquer par l'habilité à manier deux enfants terribles de la commu-nication connectée : le fake (ou hoax) et le message masqué. S'il n'est pas nécessaire, derrière un écran, de se déguiser en robot, ni en cascadeur, l'anonymat des auteurs a sûrement beaucoup joué en leur faveur. Il s'explique facilement chez Darons, car ses rédacteurs ont aussi un métier (produire de la véritable information parentale), mais il est ardem-ment mis en scène au Gorafi. Avec un directeur imaginaire, Jean-François Buissière et deux têtes pensantes, seulement démasquées en début d'année pour la promotion de leur premier recueil imprimé. « Au Bilboquet, on n'agit pas de façon anonyme et je peux même vous dire que mes deux acolytes travaillent à l'ONU et à l'Ambassade de France au Laos. En revanche, c'est vrai, une question revient souvent, comme un fantasme : vous n'êtes pas journalistes ? »

une hisTOire vraie–

« Il y a une longue tradition de la fausse information dans le monde anglo-saxon, mais aussi dans le paysage médiatique français.» Stéphane de Rosnay a commencé sa carrière dans la publicité avant de devenir journaliste, producteur et édi-teur : Infos du Monde, Le Monte, le Nouvel Indigné. Toute sa démarche, et les nombreux degrés qui semblent l'éloigner d'un humour de rez-de-chaussée, peuvent apparemment se résumer entre le nom de son site (La connerie du jour) et une adresse mail : Lifeisagame. En tous les cas, il parle vrai : qu'ils s'en réclament ou non, les sites d'infaux s’inscrivent dans une histoire médiatique, qui permet de rire, critiquer,

mais aussi d'informer. Dans son premier édito, en 1915, Le Canard Enchaîné promettait, par exemple, de « n'insérer, après minutieuse vérification, que des nouvelles rigoureu-sement inexactes ». Si le journal reste surtout connu pour la qualité de ses sources, il entretient toujours la pratique, notamment à travers les interviews (presque) imaginaires ou le journal des premières dames. La presse parodique a également traversé l'histoire et, comme les écrits restent, chaque époque a laissé ses petites cocottes en papier. Dès la fin des années soixante-dix, par exemple, la grande fa-mille Tellenne, dont sont issus Karl Zéro, Basile de Koch et une pièce rapportée qu'on aurait préféré éviter (Frigide Barjot), forme le collectif Jalons, connu notamment pour ses fausses nouvelles et ses pastiches de journaux : Le Figagaro, L'Abberation, Voiri, etc. Stéphane de Rosnay évite toute filiation, surtout avec Frigide, mais ses propres publications ont perpétué la discipline, tout comme Groland, à la TV, avec son faux pays, son faux président et ses faux médias : Le Journal du Gromanche, Les Échus, Rue 69… En termes de fausses nouvelles, Infos du Monde, lancé en 1994 avec Daniel Filipacchi, a aussi atteint les sommets, avec ses 400 000 lecteurs et ses unes déconcertantes : « La mère a deux têtes et son bébé a deux têtes », « Kennedy vivant ! », « Je suis le 4ème 2B3. » Cet OVNI médiatique, jamais à court d'extra-terrestres et de photo-montages, était inspiré d'un tabloïd américain, Weekly World News, qui illustre égale-ment le savoir-faire anglo-saxon en matière de hoax. Dès 1988, deux étudiants du Wisconsin lancent The Onion, un autre faux journal à succès, qui détourne toutes les pratiques médiatiques abusives (micro-trottoirs, sondages d'opinion), en se revendiquant comme la meilleure source d'information des États-Unis. Le site Internet, suivi quotidiennement par une communauté très active (près de 10 millions d'abon-nés, sur Facebook et Twitter), est souvent cité comme la référence ultime du Gorafi et de ses petits. On y apprend, par exemple, que 99% des Américains n'ont jamais rencontré l'acteur William Dafoe ou que le dictateur nord-coréen Kim

Un vrai-faux magazine de Darons, avec aussi : « Les mamies gameuses fans de Call of Duty », « Le pain de mie sans mie », « Une fillette sauvageusement mordue par une télécommande », « Des traces de pommes de terre dans la purée Mousline », « Les Français à la peine aux Mondiaux d'apnée en piscine à balles », etc.www.darons.net

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en queLques chiFFres

-

300 000La mairie de paris coLLe 300 000 stickers de porte et des sonnettes factices pour

décourager Les témoins de jéhovah.bilboquet-magazine.fr

/4mentionner sa pédophiLie sur son cv

diviserait par 4 Les chances d'obtenir un empLoi.

legorafi.fr

4141 % de La popuLation veuLent La mort des

joueurs de L’equipe de france.footballfrance.fr

50Le changement d’heure provoquerait une cinquantaine de divorces chaque année.

lebourbierinternational.com

24norvège : une conserve de harengs

de 24 ans menacerait de se faire expLoser.agence france Presque

16enceinte de 16 mois,

eLLe n’accouchera pas tant qu’eLLe n’aura pas fini WorLd of Warcraft.

veuxjideo.com

7record : une jeune maman parvient

à ne pas mentionner son bébé pendant près de 7 heures d'affiLée.

lecourrierdesechos.fr

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Le premier numéro

d'Infos du Monde, à trois francs cinquante.

Tout est dit(n° 12, n° 22 et n° 52).

De nOMbreuses PéPiTes sOnT venues

PrOgressiveMenT cOMPLéTer

La cOnsTeLLaTiOn Française

De L'inFauX, généranT un FLuX

De Fausses nOuveLLes quOTiDiennes

eT une sOrTe De réaLiTé ParaLLèLe

à chaque DébarqueMenT

sur ses réseauX sOciauX.

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Jong-Un est élu « Homme le plus sexy de la planète ». Le Journal officiel du Parti Communiste Chinois a immédiatement relayé.« The Onion rassemble une dizaine de rédacteurs perma-nents, raconte Matthieu, qui proposent 500 ou 600 titres par semaine pour n'en garder qu'une vingtaine. C'est dire si les contenus peuvent être drôles et pertinents ! ». Bilboquet Magazine se reconnaît justement dans cet esprit anglo-saxon, doté d'une franche coudée pour l'auto-dérision. « On aime les Simpson, les Monty Python et le fait de se moquer de soi-même, sans faire de mal à personne, comme si c'était au public de se dire, en nous lisant : mais comment ont-ils été capables de publier un article aussi surréaliste ? » D'ailleurs, les auteurs positionnent clairement leur initiative dans le champ de l'humour. « On écrit de manière différente et on utilise des palettes, assez variées, pour s'amuser. » Lui construit par exemple ses informations avec la technique des mind maps, permettant de représenter l'univers d'un sujet et d'inventer de nouveaux liens entre les choses, en particulier lorsqu'elles s'opposent : « Le pape remplace l’hostie par un double whopper », « Nous avons testé la sucette au cya-nure ». « Au Bilboquet, on n'est pas dans la satire, politique ou médiatique, et on serait sûrement plus doués pour écrire un spectacle qu'un vrai journal… »

Le vrai Du FauX–

« J'espère avoir contribué, avec Striptease ou Tout ça (ne nous rendra pas le Congo), à innover dans le traitement de l'info ; car on ne peut pas dire qu'on en fait trop à ce niveau ! » Journaliste et réalisateur de documentaires, pour la télévision publique belge, Philippe Dutilleul s'est illustré, en 2006 avec l'émission Bye Bye Belgium, un vrai-faux JT annonçant la scission du pays. Un véritable coup de tonnerre dans le champ médiatique, relayé dans le monde entier, avec un questionnement journalistique en forme d'éclair : peut-on prêcher le faux pour soulever certaines vérités ?Avec son nom volontairement désuet et détaché des codes de la presse, Bilboquet Magazine ne cherche pas à se moquer des médias, mais d'autres propagateurs de fausses nouvel -les s'en font justement une raison. « J'ai créé l'Agence France Presque comme une réaction à toutes les conneries que je voyais sur Twitter, venant de médias réputés sérieux, notam -ment l'AFP. Des fautes, des contresens, des errata… L'actu est souvent reprise de façon un peu trop rapide ; ce ce n'est plus de l'info, c'est presque de l'info ! » À travers ses dé-pêches, parfois inspirées d'erreurs réelles et souvent potaches, l'Agence France Presque met ainsi en scène une rédaction de « stagiaires » qui se précipite, un peu vite, sur les auto-routes de l'information. Ironie du sort, elle doit son succès (22 000 followers) à une mise en demeure de l'AFP : « Elle m'a réclamé 3 000 euros et menacé de procès pour utilisation frauduleuse de son image. Mais l'histoire a été reprise par d'autres médias, dont Libération ou Le Nouvel Obs, qui étaient plutôt bienveillants à mon égard et ont alimenté le

sTÉphane de rosnaYPUBLiCiTAiRe, PRODUCTeUR TV, RéDACTeUR en CheF De LUi, JOURnALiSTe AU CAnARD enChAîné, Le CO-FOnDATeUR D'Infos Du MonDe A à PeU PRèS TOUT VéCU. Y COMPRiS L'APPARiTiOn De JéSUS DAnS LeS nUAGeS OU LA DéCOUVeRTe D'Un BéBé De 76 AnS…

POurquOi avez-vOus Lancé Infos du Monde, en 1994 ?nous avons imaginé Infos du Monde avec Daniel Filipacchi comme un journal "fouteur de merde", que nous faisions essentiellement pour nous amuser. Un vrai-faux tabloïd, comme il n'en existait pas en France à l'époque. il n'y avait aucune ambition militante… Se foutre de la gueule des médias prétendument sérieux, évidemment. Mais on ne cherchait pas non plus à leur faire la leçon.

cOMMenT éTaiT Fabriqué Le JOurnaL ?nous étions trois au journal, disposant de vingt pseudos, accompa-gnés de six ou sept pigistes. Tout se faisait dans un bureau de quinze mètres carrés… Beaucoup de gens, plus ou moins mythomanes, font croire aujourd'hui qu'ils travaillaient à Infos du Monde, voire qu'ils étaient co-fondateurs ou rédacteurs en chef, alors qu'ils ont écrit deux ou trois papiers en tout ; et en plus, de chez eux… C'est notamment le cas de Frédéric Royer, qui a fondé les Gérard du Cinéma : il se présente comme l'un des piliers du journal alors qu'il ne travaillait même pas avec nous, n'étant que pigiste…

qui LisaiT Infos du Monde ?Comme il n'y avait pas de publicité, on n'a pas fait la moindre étude de lectorat. Mais je sais que les publics étaient très différents. Certains l'achetaient avec Les echos ou Le Monde, le lectorat 38e degré, et d'autres avec des trucs encore plus trash. On faisait aussi un carton dans les écoles…

queLLe a éTé La MeiLLeure PériODe ?Le journal a été lancé en mars 1994, chez Filipacchi. C'était un hebdo à succès : nous en vendions parfois plus de 400 000 exemplaires, chaque semaine. Ça a duré un an. en 1995, le titre a été racheté par un petit éditeur qui a sorti quelques numéros, pendant plusieurs années, mais ça n'a pas marché… il a définitivement disparu en 1998.

qu'esT-ce qui FaiT Le succès, seLOn vOus, D'un FauX JOurnaL ?Je ne pense pas qu'il y ait une recette, plus qu'une autre, mais plu-tôt une combinaison d'éléments, comme pour toute publication. L'adéquation avec l'époque et l'attente du public, à un moment donné, est essentielle. Ce fut sûrement le cas pour Infos du Monde au milieu des années quatre-vingt dix. Après cette aventure, j'ai lancé d'autres titres. Le Monte est un pastiche, donc un genre très différent. Quant au Monde des médias et au nouvel Indigné, ce sont des journaux sérieux, d'information, qui n'ont donc rien à voir avec les précédents.

Infos du Monde a-T-iL insPiré, D'une FaçOn Ou D'une auTre, Les siTes D'inFauX ?Pour moi, nous ne sommes précurseurs de rien ! Les médias sati-riques et les supports de fausses informations ont toujours existé. Le Gorafi s'inspire de The onion, qui s'inscrit lui-même dans une longue tradition universitaire américaine. et d'autres médias s'inspirent aujourd'hui du Gorafi…

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buzz. » Le stagiaire-en-chef accepte de changer de logo, mais pas d'agence, pour continuer à annon-cer que le selfie fait son entrée au programme du CAP ou que Jean-François Copé est soupçonné d'avoir favorisé l'artisanat, plutôt que l'industrie, dans l'affaire des pains au chocolat. Au CdE, dont l'image et le rubricage sont clairement inspirés de la presse classique, la promesse éditoriale est as-sez proche (Publish first, Check later), comme un message à peine subliminal envers le journalisme de TNT. Le Gorafi est apparemment moins disert sur l'ambition réelle de ses fausses nouvelles, mais il détourne et retourne, encore plus qu'ailleurs, tous les attributs de la presse contemporaine : avec son groupe imaginaire, à terminaison ner-veuse (Gorafi News Network) et son « Président du directoire », qui a aussi une bonne tête de mar-chand d'armes. Au-delà des titres, tous les articles sont écrits en jargon journalistique, avec ses dé-cryptages, ses interviews, ses chiffres invérifiables. « Oui, nous avons fait une erreur […] mais avant tout, j'ai une pensée pour tous les propriétaires de BX, a déclaré le directeur général de Citroën au cours d'une conférence de presse » destinée à présenter les excuses officielles de la marque pour cette voiture. Les sondages d'opinion sont aussi mobilisés largement, non sans ironie : selon Ipsos pour LeGorafi.fr, par exemple, « 3/4 des Français pensent que vous êtes juste une merde ! »En Belgique, l'expérimentation médiatique de Philippe Dutilleul n'a pas fait rire tout le monde, loin de là. « On a travaillé deux ans, en secret, sur le projet, pour écrire le scénario et tourner les reportages, comme la fameuse séquence où le tramway s'arrête à la frontière. » Les usagers, qui n'étaient pas au courant, descendent, incrédules, de la rame… « Je savais que la démarche était iné-dite, mais je ne m'attendais pas à un tel émoi. Au départ, on a été assassinés ! » Toute la classe poli-tique condamne, un ministre revient en urgence de l'étranger et de nombreux journalistes ne sont pas plus tendres. « Ils nous reprochaient le mélange des genres, dans la mesure où une partie de la rédaction a été mobilisée pour jouer la comédie.

Or, l'initiative reposait justement sur une volonté de secouer les choses, notamment dans le champ médiatique, où le traitement de l'information est de plus en plus standardisé. » À ce titre, l'expé-rience reçoit aussi de nombreux soutiens et reste un poisson-pilote dans l'invention de nouveaux formats. Plusieurs émissions d'anticipation ont depuis vu le jour, basées sur des fausses nouvelles, comme l'arrestation de Ben Laden, en 2008, sur Jimmy. « J'ai même été contacté, il y a quelques années, par une chaîne publique israélienne qui voulait annoncer la paix ! » En plus, d'après le Bilboquet, la Belgique reste la meilleure pour régler les conflits : elle a proposé par exemple de résoudre la crise syrienne, comme chez elle, au ChiFouMi…•

en plus de ses contenus

quotidiens, Bilboquet Magazine propose également des

Bilbozap, en vidéo, et les questions-réponses au

Professeur Barrias : « Pourquoi les chiens ont-ils le nez froid ? »,

« Que pensez-vous de la mort de Mandela ? »,

« est-ce que les poules peuvent voler si elles en ont vraiment envie ? »

à Travers ses DéPêches,

ParFOis insPirées

D'erreurs réeLLes,

L'Agence frAnce Presque

MeT ainsi en scène

une réDacTiOn

De "sTagiaires" qui

se PréciPiTe, un Peu viTe,

sur Les auTOrOuTes

De L'inFOrMaTiOn.

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c a h i e r m o d ekxM-T

Photo : MOOS-TANGStyliste : Alix DevalloisAssistante styliste : Cécilia Leniaud

Make-up/Hair : Jay KwanAssitante Make-up : Mellissa Fernandes de Souza

Models :Alexandra LepoixSophie Disaro

lunettes # ASOS | top # ELEVEN 

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  Attention. Une imprimante 3D, avant toute chose, est un appareil généreux, que l'on peut construire seul (avec un bon tuto), et qui, reliée à un computer, permet de construire par couches suc-cessives de fils de matière à peu près tout ce qui se passe dans un esprit malin. La tête chauffante de la machine va faire fondre la matière et la déposer selon des plans machiavéliques imaginés sur un logi-ciel de 3D. Des gens très sains ont ainsi générés pêle-mêle et de façon non exhaustive : des appliques personnalisées pour nail art (art de l'ongle incarné), une coque de téléphone intelligent qui s'adapte à votre goût prononcé pour les dauphins, une statuette d'un mini-soi de 20 centimètres transformable aisément en porte-clé, ou des Legos à volonté. D'aucuns crient au génie (la possibilité de répondre à des besoins sommaires rapidement et chichement) quand d'autres hurlent au scandale (tiens, je me ferais bien une petite kalachnikov moi) ; mais qu'en dit l'homme qui balancerait des tweets de menace contre les spoilers le jour de la sortie la saison 2 de House of Cards sur Netflix :

« L’année dernière, nous avons créé notre premier institut pour l’innovation de la fabrication à

Youngstown dans l’Ohio. Aujourd’hui, ces entrepôts délabrés sont devenus des laboratoires de

pointe où les employés maîtrisent l’impression 3D qui a le potentiel de révolutionner la manière

dont nous fabriquons pratiquement tout. Il n’y a aucune raison que cela ne se passe pas aussi

dans d’autres villages. […] Et je demande au Congrès d’aider à la création d’un réseau de quinze

de ces centres et de s’assurer que la prochaine révolution en matière de production soit menée en

Amérique. Si nous voulons fabriquer les meilleurs produits, nous devons également investir dans les

meilleures idées. »

03

Un pied dans la Modddeou comment l'impression 3D redéfinit les dress codes

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Mais si Barack est autant à fond, c'est qu'il a écouté Michelle, la belle, et son goût prononcé pour l'habillement stylé. En effet, la mode fricote déjà depuis quelques années avec ce beau phénomène 3D. Depuis les lunettes Incognitoles conçues par Maison Martin Margiela en 2008 01, quelques phénomènes imprimés en trois dimensions sont venus titiller les podiums. Iris van Herpen 02, une geek hollan-daise notable, fut l'une des pionnières du genre. Elle crée de véritables robes sculptures hallucinantes de légéreté qui habillèrent cet hiver la très chère Lady Gaga (déjà coutu-mière du fait avec le studio londonien XO). En mai, c'était Dita Von Teese et sa robe articulée dessinée par le designer Michael Schmidt, l’architecte Francis Bitonti et l'entre-prise Shapeways qui faisait jaser le tout New York avec ses 17 pièces, plus de 3 000 articulations et 12 000 cristaux Swarovski, rien que ça. Les 14 et 15 février derniers, La Mecque en la matière, le désormais fameux 3D Printershow, a pris ses quartiers dans la capitale américaine après être passé par Londres et Paris en 2013. Au menu, de la 3D dans tous les sens y compris en direction de la mode en général et des footeux en particulier.

Les mastodontes comme Nike 03 ou New Balance 04 n'ont pas tardé à sortir du placard des modèles à semelles à cram-pons imprimés en 3D (pour le football américain, chez la firme au swoosh, et pour l'athlétisme, chez NB). Le prin-cipe est à peu près le même : grâce à la technique FSL (frit-tage sélectif par laser) l'imprimante 3D dessine les contours d'une semelle personnalisée qui épouse à la perfection le pied et s'adapte aux mouvements des athlètes ainsi totale-ment "refaits". À l'instar de la start-up californienne Feetz, un jeune chercheur français, Luc Fusaro 05, a quant à lui développé sa propre chaussure intégralement réalisée en imprimante 3D. Et d'autres s'y sont collés, y compris dans la chaussure de classe, comme les créateurs Hoon Chung, Pavla Podsedníková 06 ou le site continuumfashion.com.

Si les grandes marques se positionnent déjà sur la techno-logie 3D, c'est bien qu'à terme, elle pourrait leur faire de l'ombre. L'impression 3D permet en effet la personnalisation à outrance et crée de fait une certaine rareté, mais elle inclut aussi, à l'inverse, la mise en commun de tout savoir maî-trisé. La philosophie open source, sous-jacente à l'émergence de ces machines, a permis à des communautés structurées d'échanger librement pratiques et savoirs et annonce la fin possible de la "dictature" du copyright. À contre-courant de la surconsommation, l'imprimante 3D peut traduire une volonté certaine de repenser notre consommation dans une économie « à la demande » éloigné de ses excès d'antan (déchets, délocalisations, etc.). Mais si on veut conserver nos pratiques de sneaker addict, à la virgule près, aucun souci : il suffit de demander à vos enfants de passer derrière l'imprimante 3D et de leur donner 5 euros une fois le travail terminé (soit le coût de revient de votre basket personnalisée réalisée à domicile).

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baskets # NEW BALANCE | chaussettes # ADIDAS

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veste argenté # MONkI | jupe # PUMA | baskets # NEW BALANCE 

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veste # ADIDAS | collant 3/4 # SALOMON | baskets # ADIDAS

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veste # ELEVEN | short # SALOMON | baskets # ADIDAS BY STELLA MC CARTNEY

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jupe # ASOS | baskets # ADIDAS

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top a capuche+ top+ short # ADIDAS BY STELLA MC CARTNEY | baskets # ADIDAS | chaussettes # ADIDAS

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brassière # NIkE

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CENTRE DE DOCUMENTATIONET D’INfORMATION

r é d i g é p a r m a x i m e g u e u g n e a u & c o

n.f. (anticipatio). Action de se projeter dans l'avenir, de se représenter les résultats

attendus d'une action cognitive. Ex : « Le succès est arrivé très vite, je n'ai

pas su faire preuve d'anticipation » - Jordy. Se dit aussi de leitmotivs d'artistes

qui œuvrent pour le futur.

Fig. 1 : Joe_

[ m u s i q u e ] . 2014, la vie et la mesure sont au binaire et l'heure au retour en grâce d'un clubbing décomplexé, presque trop en paix avec son passé. Mais certains producteurs anglais s'efforcent encore de repousser les contours de leur musique, faisant de

leur liberté de ton le terreau de leur succès. C'est dans des sets animés par cette liberté qu'on pourra être amené à entendre un morceau de Joe.Il semble que dès le départ, au moment de choisir un pseu-donyme, Joe ait décidé de ne pas céder à l'esbroufe : pas de mise en scène, pas de théâtre même : ce sera de la musique. On pourrait facilement lui coller une étiquette de quatrième homme du label Hessle audio, fondé par Pearson Sound, Pangea et Ben UFO, mais on perdrait ainsi l'occasion de se concentrer sur sa singularité. On pourrait lui opposer un rythme de sorties très peu soutenu (sept singles en quatre ans), mais on serait obligé de se raviser puisque chaque sor-tie est remarquable. On pourrait lui reprocher sa rareté sur scène, mais au final, même Burial n'a pas envie de monter sur scène…La musique de Joe est peut-être un de ces plaisirs égoïstes, de ceux dont on ne parlera pas vraiment en espérant l'appro-bation de son auditoire. Un de ces producteurs dont on ne parlera pas ou peu, mais dont on jouera les productions dès que possible. Parce qu'on trouverait cela fou que le monde l'aime et le reconnaisse à la hauteur de ce qu'il est, mais ça ne semble pas possible. Pierre Serafini

• Joe - Slope EP, sorti chez Hessle Audio en oct. 2013 ; 

Punters Step Out, sorti chez Hemlock Recordings en déc. 2013 

 soundcloud.com/joemakemusic ; residentadvisor.net/dj/joe

Fig. 2 : Poster For tomorrow 2014_

[ g r a p h i s m e ] . Au graphisme, il est demandé beaucoup. Signalétique, programme culturel, publicité, affiche poli-tique, celui-ci se retrouve tiraillé entre mille et un champs d'action, trop souvent à la merci de clients dédaigneux. Pourtant, celui-ci n'a qu'un rêve : briller par et pour lui-même au service d'une action, d'un message qui le rendrait fier. L'association Poster For Tomorrow a entendu cet appel à l'aide, et offre aux graphistes l'occasion d'œuvrer pour le bien de l'humanité, chaque année depuis 2009. À l'origine se trouvait la prise de conscience d'un petit groupe de designers devant les plaies béantes dont souffre notre humanité. Ils ont choisi de lutter contre la détresse du monde avec les armes à leur disposition : le poster et le talent. S'en est suivi l'organisation d'un concours d'affiches, puis d'expositions transportant leur message de paix de pays en pays. L'audience grossit peu à peu et de plus en plus de graphistes souhaitèrent être de la partie. Les thèmes abordés sont aussi larges qu'essentiels, de l'égalité homme / femme à la liberté d'expression, en passant par la lutte contre la peine de mort ou le droit au logement. Cette dernière campagne fut d'ailleurs un réel succès avec la participation de 3461 graphistes, illustrateurs et photographes pour 100 sélec-tionnés, et des expositions qui ont eu lieu dans 30 villes du monde. L'appel à contribution pour Poster For Tomorrow 2014 est d'ores et déjà lancé, avec pour thème le Droit au Travail. Gageons que les artistes participants sauront façon-ner un écrin à la juste mesure de l'enjeu.• Appel à contribution jusqu'au 10.07 ; Publication  

des résultats et démarrage des expositions en décembre.

 www.posterfortomorrow.org

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Fig. 3 : A tAste oF London_

01- Julien Magnani recherche appartement ou maison, sans pourtant faire appel à M6. C'est plutôt à ses modules qu'il se fie pour construire un livre sobre et géométrique, mais d'une beauté remarquable. Maison de Julien Magnani, Magnani Éditions, Couleurs, 48 pages, 13,90 euros. editions-magnani.com

02- Et si le monde dans lequel nous vivons n'était qu'un jeu pour dragons en pleine poussée d'hormones ? C'est le parti pris de la petite merveille du Finlandais Roope Eronen, Offices & Humans, qui renverse les mondes de Donjons & Dragons pour faire de notre vie routinière le lieu de tous les fantasmes pour dragons et autres chimères. Offices & Humans de Roope Eronen, Misma Éditions, Couleurs, 168 pages, 17 euros. misma.fr

03-Comme chaque année, au moment où le ciel est gris et les arbres nus, les éditions Arbitraire font de nouveau briller le soleil dans nos cœurs grâce à leur revue annuelle. Pour le n°12, l'équipe est restreinte mais le projet est beau avec une lecture ascensionnelle, de bas en haut, pour une métaphore alpine de la montée aux cieux. Arbitraire 12, Éditions Arbitraire, Couleurs, 48 pages, 14 euros. arbitraire.fr

04-Adventice Editions est une maison d'éditions lausannoise du goût le plus chic. En témoigne sa revue Adventice basée sur la confrontation intellectuelle entre deux sujets apparemment opposés. Le n°2, sorti en février voit des artistes, chercheurs et critiques penser sur le thème « Rêve et Industrie », le tout mis en page par la délicate Florine Bonaventure. Adventice 2, Adventice Editions, 124 pages, 20 euros. adventice-editions.com

05-Les Rencontres de Lure ne sont pas que cet éblouissant rassemblement annuel de typographes et d'amoureux de la lettre. Depuis l'année dernière et sous l'impulsion de Sandra Chamaret, Marie-Astrid Bailly-Maître et Julien Gineste, elles publient la revue annuelle Après/Avant. Le deuxième numéro est attendu pour fin avril et peut déjà compter sur pas moins de 150 contributions typographiques. Après/Avant #2, Éditions Rencontres de Lure, Couleurs, 72 pages, 10 euros. delure.org

06-La revue Citrus entend se faire l'écho du renouveau palpable de l'illustration dans le monde. Publiant de jeunes et prodigieux artistes aux côtés de textes (fictions, reportages, essais) ébouillantés par un thème de réflexion unique (pour le n°1, le football), la revue dirigée par Anne-Lise Le Brun et Choé Marquaire réussit le pari de la beauté et du sérieux. Citrus 1, Éditions L'Agrume, Couleurs, 256 pages, 20 euros. facebook.com/revuecitrus

[ e x p o s i t i o n ] . Cela peut paraître éton-nant, mais il arrive que nous, Français, aimions l'Angleterre. Une magnanimité notable puisque cette perfide Albion nous causa, au cours de notre histoire, plus de désagréments qu'il y a d'épines sur un our-sin. Oui, mais voilà, notre grandeur d'âme nous oblige à reconnaître qu'il y a quelques domaines ou ces britanniques ne s'en tirent pas trop mal. Ainsi en est-il du clip d'animation et de son évolution numérique, domaine dans lequel le collectif (anglais, donc) Nexus a su tirer son épingle du jeu, et mieux que ça encore. Le Cube, dans son incom-parable bonté, leur offre son espace d'exposition durant six mois.Le centre de création numérique d'Issy-les-Moulineaux a en effet décidé de réaliser un focus sur le travail de cet incomparable collectif qui compte dans ses rangs Smith

and Foulkes, Jonas Odell, Johnny Kelly, Quayola, The Thoery, Evan Bœhm ou encore Felix Massie. Cette belle bande mérite amplement cet égard, elle qui brille depuis plus de 15 ans dans les domaine de la publicité, du court-métrage ou du vidéo clip. Ces spécialistes de des animations des-

sinée, 2D et 3D se sont rendus coupables d'avoir su trans-former leurs commandes en véritables œuvres d'art, par ailleurs dûment récompensées en MTV et autres Grammy Awards. Le panorama qu'offre Le Cube est ainsi l'occasion d'embrasser d'un seul regard les différents travaux de ses artistes aux visions différentes mais aux cœurs semblables. C'est ce qu'on appelle l'entente cordiale.• A Taste of London : Focus sur Nexus jusqu'au 26.07 au Cube, 

à Issy-les-Moulineaux.

 www.lecube.com ; www.nexusproductions.com

n.f. (βιβλιοθήκη). Meuble ou endroit où sont conservés les livres ; collection organisée de livres. Ex : « Non mais une bibliothèque, on n'est pas forcé de mettre des livres dedans, si ? » - La Fouine. Se dit aussi d'une liste d'ouvrages à consulter absolument.

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Créd

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n.m. (circare). Esprit curieux poursuivant sans cesse de

nouvelles découvertes. Ex : « Je suis chercheur dans le

domaine du menton » - Igor Bogdanov. Se dit aussi

de festivals ou de revues avides de nouvelles choses.

[ c r é a t i o n r a d i o ] . La radio n'est pas seulement ce babillage intensif qui nous réveille chaque matin entre deux publicités fendardes mettant en scène des comiques oubliés. Elle est aussi un média sonore à même de se réinventer et de bous-culer des codes trop bien établis. Radio Campus Paris et la salle de spectacle La Loge en sont en tout cas convaincus, et dédient à la création radiophonique une petite semaine de leurs programmations respectives. L'habilement nommé Festival Brouillage tiendra ainsi sa première édition du 15 au 18 avril.

Entre reportages aventuriers et tentatives électroacoustiques, entre installations sonores et fictions théâtrales, Brouillage balaiera une bonne partie des possibilités qu'offre la radio. La Loge et Radio Campus s'appuieront pour cela sur une fière brigade d'amateurs en bidouillage et de téméraires artistes sonores. Sont ainsi convoqués pour la grand messe en modulation de fréquence : l'ésotérique Vincent Moon qui créera une pièce autour du sacré et du rituel, La Radio Cousue Main, émission de performances d'« Hand Made Radio Art » ou l'art de créer du son en direct et sans ordi-nateur, le trio Chloé Sanchez, Guillaume Michelon et Lucas Pizzini, avide d'expériences indo-utopiques ou encore Gerald Kurdian aka This Is The Hello Monster qui sortira tout juste de sa résidence électronique à Mains d'Œuvre. Cela et bien d'autres perturbations radiophoniques sont à prévoir sur Paris. Mais pas d'inquiétude, ces ondes là sont bénéfiques.• Brouillage, du 15 au 18.04 à La Loge et à Radio Campus,  

à Paris et en écoute sur le 93.9 FM.

 www.radiocampusparis.org ; www.lalogeparis.fr

Fig. 2 : BrouiLLAge_

[ p r i n t ] . The Parisianer est un projet audacieux de l'association La Lettre P. Les initiateurs, Aurélie Pollet et Michael Prigent, ont demandé à des dessinateurs de créer une couverture représentant leur vision de Paris, de raconter leur Ville Lumière au travers de la couverture d'un magazine ima-ginaire se référant clairement au New Yorker et à ses couvertures mythiques.Après une exposition à la Cité Inter-nationale des Arts fin 2013, le livre sort en librairie, qui rassemble les œuvres de 108 artistes. Chacun offre un regard original sur la ville, et le travail pré-senté sublime le projet.Certaines couvertures se savourent, d'autres interrogent. Certaines sont

légères, guillerettes, d'autres sont plus graves, proposant un message plus social. On y trouve des Tours Eiffel, des bords de Seine, des kiosques, des amoureux, on y danse, on y fume, on y mange, on s'y étreint, on y cherche l'amour. Bref, ces couvertures représen-tent la vie.Les artistes participants constituent une grande partie de ce qui se fait de mieux dans la domaine du dessin en France actuellement (illustration, livre jeunesse, graphisme…) avec des artistes de renom et des talents émergents.Un livre pour les amoureux du dessin, pour les amoureux de Paris, pour les amoureux des beaux livres.Basil Sedbuk

• The Parisianer, La Lettre P/Éditions 

Michel Lagarde, 20 euros, sorti le 14.03

  theparisianer.fr

Fig. 1 : the PArisiAner_

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n.m. (cocktail). Boisson composée de plusieurs

boissons. Par extension, mélange. Ex : « Avec nous, c'est toujours un cocktail

d'humour, d'émotion et d'intelligence » - Les Chevaliers

du Fiel. Se dit aussi d'artistes ou de festivals nourris de

multiples influences.

Fig. 2 : 8tm_

[ m u s i q u e ] . Les traditions sont faites pour mourir. Longtemps en froid avec tout ce qui n'était pas du rap new-yor-kais bon teint, la France voit émer-ger depuis peu une génération qui se fiche bien de l'origine citadine de ses références. Alors que les anciens ne juraient que par DJ Premier, Havoc et autres RZA, d'autres arrivent, bour-rés de références un poil plus distantes au niveau spatio-temporel. Goûtant aussi bien les joies fournies par Pimp C, J Dilla, Erick Sermon, Young Chop, Zaytoven ou DJ Paul, 8tm est ainsi l'un de ces producteurs à l'oreille ouverte. Mieux, il est l'un des meilleurs.Il n'a fallu en effet que deux EPs à 8tm

et une poignée de morceaux épars pour que la France du rap et de la musique électronique se rende compte qu'elle tenait là une petite merveille sonore. De ses influences et références mul-tiples, 8tm forge une musique com-plexe, sirupeuse, mêlant allègrement nappes lascives et grasses basses. Smell My Cologne, son récent EP hommage aux légendes texanes UGK (sur lequel sont par ailleurs invités Myth Syzer et Aayhasis), est en cela une parfaite démonstration, entre funk sensuel et trip d'éther. Proche de Grandville Records et du collectif Fusils à Pompe, 8tm creuse pourtant tout seul le sillon de sa future

renommée. Derniers faits marquants : sa récente et virale cover (avec la chan-teuse Gaïa) du « Danny Glover » de Young Thug sur Cosmonostro, son remix de « Diamand » pour Myth Syzer et sa participation à l'excitante aventure de Rinse FM en français. Il semble que le futur de la production française ne pourra pas se passer de lui.• Smell My Cologne, disponible 

gratuitement sur soundcloud.com/8tm. 

8tm anime l'émission Rap Office, tous 

les 2e mercredi du mois sur Rinse.fr.

 soundcloud.com/8tm ;  

facebook.com/8tm8tm 

[ a r t s n u m é r i q u e s ] . « Je est un autre » disait autrefois le poète. Oui, mais qu'en est-il du jeu ? Et, plus encore, qu'en est-il du « je » dans le jeu ? À quel point le jeu transforme le nous ? Comment l'art numérique peut-il nous tirer de ce bourbier ? Le courageux festival Bouillants a choisi de prendre ces questions à bras le corps afin de démêler le dense écheveau que constitue aujourd'hui la place du jeu vidéo dans notre société. À la fois symbole du « je » à son paroxysme et nouvel espace de collaboration mondiale via internet, le jeu vidéo se retrouve tour à tour encensé et décrié. Les trop rares réflexions à ce sujet deviennent rapidement obsolètes, et l'individu comme la collectivité sont bien souvent mis devant du fait accompli. Un pas en arrière était nécessaire et Bouillants recule, lui, de trois pas, comme on doit le faire devant une œuvre d'art.Car, oui, c'est avant tout d'art dont il est question sur le festival breton, avec près de 30 propositions

issues de tous horizons, d'artistes confirmés à étu-diants. Au sein de cette foisonnante programma-tion, nous retiendrons quelques jolis noms comme le duo allemand ////Fur////, de retour en terre gallo avec deux œuvres (Golden Calf et Painstation), mais aussi David Dufresne et son Fort McMoney, soutenu par ARTE, Martin Le Chevallier et son Vigilance 1.0, ainsi que le très cinéphile Julian Palacz et son Algorithmic Search For Love. Et c'est avec une curiosité non-feinte que nous nous penche-rons sur le casse-brique codé de Florent Deloison (Hommage à New-York), le tennistique Nadal de Paul Destieu, la nerveuse application Finger Battle de Rafaël Rozendaal ou encore l'hommage à Final Fantasy VII de l'Association Mille au Carré. Le Je(u) est à l'honneur en ce printemps breton.• Bouillants #6, du 6.04 au 1.06 à la laiterie Les 

Bouillants de Vern-sur-Seiche (35), proche de Rennes.

 bouillants.fr

Fig. 1 : BouiLLAnts #6_

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n.m. (cumulus + nimbus). Nuage dense et haut, donnant des orages. Ex : « Au niveau

de l'eau chaude et de l'eau froide ça déconne, ça doit être votre cumulonimbus »

- Mario Bros. Se dit aussi de festivals promettant une déferlante d'artistes

de tous poils.

[ F e s t i v a l ] . Le monde de la musique est un monde brutal. Sans pitié, sans règle, ce monde permet tous les coups, toutes les insultes entre genres et sous-genres. La condescendance et le dédain pour les goûts des autres y règnent en maître depuis au moins la création du pre-mier instrument. Pourtant, il existe au sein de ce chaos des âmes prêtes à la miséricorde et à l'amour du prochain. C'est le cas d'Arnaud Rivière, Franq de Quengo et Benoit Sonette, trois mélomanes au cœur d'or et à l'oreille délicate. Pétris de courage et d'ambition, ils se sont lancés il y a dix ans dans la création du festival Sonic Protest, festival exigeant mais ouvert à toutes les formes musicales.Cette ligne artistique aussi simple que rare permet au Sonic Protest d'être parmi les manifestations musicales les plus passion-nantes. Kim Fowley, Cut Hands, Felix Kubin,

Deerhoof, Jazkamer, Tapetronic ou encore Volcano The Bear sont ainsi passés par l'écrin Sonic Protest. La dixième édition est bien sûr l'occasion de pratiquer la méthode dite du feu d'artifice, à savoir réaliser une pro-grammation qui part dans tous les sens, avec toujours en ligne de mire l'excellence. Ainsi y retrouvons-nous Rubin Steiner, Merzbow, Lee Ranaldo & Thruston Moore (ex-Sonic Youth), Terminal Cheesecake, Brigitte Fontaine & Areski Belkacem ou encore le fou claviériste nigérien Mammane Sani. À cela s'ajoute l'exposition d'art sonore Let's Get Physical! de Tetsuya Umeda, Jean-François Laporte et Arnaud Paquotte, ainsi que moult ateliers et conférences. Un rare moment œcu-ménique dans un monde de missionnaires. • Sonic Protest, du 4 au 13.04 à Paris.

 www.sonicprotest.com 

[ m u s i q u e ] . Les temps changent, et on ne cesse de s'en plaindre. Le passé ne cesse de nous revenir comme un bil-boquet et son omniprésence ne semble vraiment pas vouloir passer. Pourtant, il est une partie de la population qui s'en-thousiasme de notre présent et entend bien vouloir construire le futur. On appelle ceux-là les jeunes. Exemple parfait de cette propension à cueillir le jour : le Weather Festival, orchestré par l'équipe de la Concrete. La première édition annonçait comme un manifeste l'avénement d'une génération mélomane envoûtée par les rythmes de la techno, à même de se rassembler et d'offrir au Grand Paris un événement digne de ce nom. Cette nouvelle mouture voit plus grand, plus gros, plus beau et impose la musique élec-tronique comme un des mouvements sonores les plus pas-sionnants. La programmation est là, impressionnante pour qui touche un peu sa bille en terme de house et de techno. Se basant sur les stars allemandes (Marcel Dettmann, Ben

Klock, Motor City Drum Ensemble, Moritz Von Oswald, etc.), les légendes de Détroit (Derrick May, Moodyman) et les mythes d'ailleurs (Luke Slater, Manu Le Malin, Ricardo Villalobos, Donato Dozzy, etc.), le Weather n'est pas avare de grosses pointures. Mais son vrai trésor se cache sans doute ailleurs, du côté de la fougue et de l'insouciance : chez la nouvelle garde, présente en nombre dans le festival parisien. Courons, donc, voir les Lowris, Antigone, Rødhåd, Behzad & Amarou, DSCRD ou encore le stage spécial jeune scène française du dimanche. Et laissons le passé définitivement derrière nous.• Weather Festival, du 6 au 9.06 à Paris, Le Bourget, Montreuil 

et Bobigny.

 www.weatherfestival.fr

Fig. 1 : sonic Protest_

Fig. 2 : weAther FestivAL_

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Fig. 1 : eLectron FestivAL_

[ m u s i q u e ] . Electron est un grand festival. Par sa taille, bien sûr, mais est-ce vrai-ment cela qui compte ? Certes, non. Si le festival genevois de musiques électroniques est grand, c'est avant tout par l'amour qu'il porte à son objet de prédilection. Loin de ne jurer que par la tête d'affiche ou par une spécialisation accrue pour tel ou tel sous-genre à la mode, Electron a toujours pris soin de représenter les musiques électroniques dans leur ensemble. Des chercheurs aux pyromanes de club, des dubsteppeurs aux maîtres minimalistes, de la légende au prometteur artiste local, Electron ne s'inquiète que d'une seule chose : que son public ait droit à de la musique de qualité.En ces termes, le contrat pour l'année 2014 a plutôt des chances d'être rempli. La programmation promet en effet des heures fameuses pour les personnes de bon goût qui auront la chance d'être à Genève. Celles-là pourront admirer, dans un premier temps, les monuments historiques qu'Electron a fait venir des États-Unis, de Belgique, d'Allemagne ou d'Angleterre : DJ Pierre, Stacey Pullen, Robag Wruhme, Deltron 3030, Front 242 ou Channel One pour ne citer que les plus beaux. Puis, se tournant vers les étoiles, ces spectateurs verront briller les stars que sont Isolée, Ellen Allien, Ivan Smagghe, Vitalic, Hot Chip, Noisia, James Holden, Âme, Max Cooper, Mr Oizo, Dillon ou Kode9. Plus près du sol, dans quelques recoins cachés, les festivaliers tomberont sur de fiers et bruts diamants à l'instar de Lucy, Giraffage, Mount Kimbie, Discodéine, Syndrome WPW, Δkkord, Perc ou encore Maëlstrom.En sus de bienfaits musicaux, Electron a également pour habitude de nourrir les esthètes de tous bords, en offrant une programmation Danse, Art Contemporain et Cinéma. La présence de Mr Oizo aka Quentin Dupieux sera ainsi l'occasion de projeter Wrong, Rubber et Wrong Cops. La grande exposition Power Tracks vol. 1 explorera quant à elle le flirt suspicieux entre musique et politique. Enfin, la danse contemporaine sifflera trois fois, par Cindy Van Acker et son Helder, par Marie-Caroline Hominal et sa performance Silver et par Elsa Couvreur et son Even Raël Would Agree sur une musique d'Extrawelt.Oui, Electron est grand, et cette année, il a encore pris quelques centimètres.• Electron, du 17 au 20.04 à Genève.

 www.electronfestival.ch

INTERVIEWELECTRONjéRôME SOUDAN

POUVEz-VOUS, EN qUELqUES MOTS, PRéSENTER LE fESTIVAL ?Chapeauté par Headfun (qui organise plusieurs évé-nements à Genève et en Suisse), le festival Electron est une rencontre annuelle durant le weekend Pascal prolongé autour des disciplines touchant aux arts électroniques. Concerts, djs, vjs, expositions, workshops, conférences, cinéma, danse contempo-raine… sont autant de volets qu'on peut apprécier au-tant dans des espaces gratuits dits "de jour" que dans les principaux clubs du centre de la ville de Genève. C'est notre 11e édition et depuis 2008 nous invitons entre 100 et 120 artistes sur quatre jours, à peu près 20% d'artistes suisses, le restant étant des inter-nationaux. Nous faisons partie du réseau de festival "europareise" se réunissant chaque année à Cologne. Au sein d'Electron nous avons également initié des programmes d'échanges entre divers organismes qui nous ont permis d'envoyer des artistes suisses en Inde, Pologne, Norvège, Grèce, France, Allemagne et Russie. Une série de 10 petits évènements pré- festival ont lieu dans toute la Suisse deux mois avant le festival. Cette année nous initions également un de ces events, couramment appelé "pré-soirée Electron" à l'I-boat de Bordeaux en France.

DE qUOI êTES-VOUS LE PLUS fIER DANS LE PROjET ELECTRON ? Le plus important pour moi est d'avoir pu au fil des ans mélanger les publics (des styles et des disciplines différentes) ainsi que les âges de nos auditeurs qui vont de 18 à 77 ans. Un autre point primordial est d'avoir su se démarquer par rapport aux autres fes-tivals de la planète au niveau de la programmation en proposant, aux côtés des noms attendus, des artistes qui tournent peu, des découvertes ou des légendes oubliées.

qUELS SONT, SELON VOUS, LES ARTISTES à NE PAS MANqUER CETTE ANNéE ?Cette année on a mis un accent important sur la musique live, c'est pourquoi même les artistes connus pour leur dj set nous font l'honneur de jouer en live, c'est le cas de James Holden, Max Cooper, Âme, Isolée… Il y a des gros spectacles, notamment Deltron 3030 avec un orchestre et aussi Francesco Tristano avec l'orchestre de chambre Geneva Kamerata. Du côté légendes à ne pas rater, je dirais DJ Pierre l'inventeur de la Acid House, ou alors Front 242, les inventeurs de l'EBM, et en new comers je dirais Jan Blomqvist, Akkord, Giraffage, Applescal et Oum Shatt, sans oublier nos incontournables Mount Kimbie, Noisia, Ellen Allien, Vitalic, Jackson & His computer band, Hot Chip en dj set…

n.m. (electric + ion). Particule élémentaire stable

de charge négative. Ex : « Vous êtes tous

qu'une bande d'électrons » Damien Saez.

Se dit aussi du festival genevois

de musiques électroniques et de haute qualité.

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Cras

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Fig. 2 : odei_

Fig. 1 : nAtALiA stuyk_

[ m u s i q u e ] . La musique est un art bien singulier. Elle plane, au-dessus de nous, vortex impalpable vers un autre monde. L'artiste en est le guide, fai-sant de son instrument et de son talent les clés pour une bienveillante excur-sion psychique. Au bout du chemin se trouve la transe, décorporation com-plète, graal atteignable seulement par quelques musiciens d'exception. Un itinéraire que connait plutôt bien le groupe basque Odei, partisan acharné du voyage auditif et spirituel.Odei est la symbiose inattendue de trois musiciens relativement différents. Arnaud et Maxime ont ainsi eu le chic de passer par le conservatoire et de

s'échiner sur le maniement d'instru-ments analogiques, respectivement bat-terie et claviers. Matthys s'est lui forgé une solide maîtrise dans l'art de faire chanter les machines, et notamment les ordinateurs. À trois, ils usent du plus court chemin vers la magie musicale : la spontanéité. Car, oui, Odei est marqué par un atta-chement viscérale à l'art de la scène et de l'improvisation qu'il magnifie comme peu de groupes aujourd'hui en France. Une vision de la musique qui exacerbe la nature mystique et ma-gique de celle-ci, dans une recherche constante du dépassement de soi. En live, les Odei se retrouvent ainsi

confortablement assis à la droite du Père, déclinant leurs harmonies élec-tro et acoustiques dans des concerts en constante évolution. Douces ou féroces, les mélodies se créent, s'émancipent et meurent dans une séance télépathique que vient soutenir le logiciel d'un offi-cieux quatrième membre, ingénieur à l'IRCAM. Un rite ésotérique qu'Odei a eu le toupet de recréer en studio et avec brio pour l'album Bat sorti chez Moï Moï, label-collectif basque. Le voyage ne fait que commencer.• Odei, en concert le 28.05 aux Nuits 

Sonores, à Lyon.

 www.soundcloud.com/odei

[ e x p o s i t i o n ] . Ces satanés artistes ont vraiment du mal à se satisfaire de l'existant. Plutôt que de rester à contempler les merveilles des temps passés, les voilà qui ne cessent de toujours aller de l'avant, de créer de l'inédit, de donner à voir de l'improbable. Aux intemporels pinceaux, crayons et fusains, ces hurluberlus préfèrent aujourd'hui les voies impé-

nétrables de l'informatique pour y créer de l'art nouveau. C'est une manie en tout point appréciable.La Londonienne Natalia Stuyk est précisément de cette race d'aventuriers, elle qui utilise son savoir-faire graphique pour donner vie à des œuvres rares et intrigantes. Cette motion designer s'est en effet mise en tête que son art ne vaudrait que s'il était en mouvement. C'est donc naturellement qu'elle s'est tournée vers la vidéo, l'art numérique et plus étonnamment vers le GIF. Brassant allègrement les influences, Natalia Stuyk mêle motif, design 3D, mode, géométrie et pretty ugly pour un résultat aussi pimpant que bluffant. Après avoir travaillé pour Kenzo, Crystal Fighters, Roses Gabor ou encore House of Holland, la voici qui s'installe dans la galerie Le Salon, à Paris, pour sa première exposition personnelle : I Would Gif You Everything. Pour voir de quoi demain sera fait.• I Would Gif You Everything, exposition de Natalia Stuyk  

à la galerie Le Salon, jusqu'au 3.04, à Paris. 

 www.nataliastuyk.com ; facebook.com/lesagparis

adj. (epidermis). Qui a rapport avec la peau. Se dit de réactions vives, instantanées.

Ex : « L'argent me débecte, c'est comme une réaction épidermique. Plus il est loin de moi, mieux je me porte » - Jérôme Cahuzac.

Se dit aussi d'artistes qui ont une réaction vive face à tout classicisme.

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Fig. 3 : PLexus_

[ d a n s e ] . Kaori Ito est née à Tokyo, elle est japonaise et dan-seuse. Aurélien Bory est né à Colmar, il est français et met-teur en scène. Ces deux êtres humains ont créé un spectacle de danse qui s’intitule Plexus (du latin plectere, entrelacer, tresser, lui même du grec "πλέκω", tricoter). Plexus signifie connexion entre deux structures, rassemblement entre dif-férents nerfs ou vaisseaux (en médecine on dit « réorganisa-tion fonctionnelle et spatiale de nerfs avec anastomose »). Plexus, que ce soit dans un dictionnaire ou sur une scène de théâtre, définit au fond ce que « vivant » signifie. Sur un plateau de théâtre, c’est une prodigieuse pièce de danse, une œuvre organique, fragile, viscérale. C’est une œuvre totale, le portrait d’un corps. Un dispositif qui s’élabore en moins d’une heure et qui vient construire l’âme d’une danseuse qui nait sous nos yeux dans le noir puis dans la lumière ; une Kaori Ito sublime qui devient prisonnière, marionnettiste de liens, de barreaux qui tissent, brisent, coupent et structurent nos vies. Avec Plexus, Bory livre une fois encore une pièce extraordinaire, qui relève de la performance artistique telle-ment sa mise en espace, en mouvements, en son, en image, en scène est hallucinante. C’est un opéra des ombres puis des

lumières du corps d’une danseuse dans une cage de cordes. C’est sublime. Ça mérite son intitulé : définir ce que vivant veut dire mais bien plus encore. François Huguet

• Plexus, pièce d’Aurélien Bory (Compagnie 111) pour Kaori Ito 

à Toulouse, Théâtre Garonne du 3.04 au 12.04.

 www.cie111.com ; www.theatregaronne.com

01-SNTWN investit pour la première fois l'illustre Rex Club. Il le fait évidemment avec brio puisque le collectif présentera le nouveau projet commun du producteur anglais Objekt (Hessle Audio, Bleep) et de Call Super (Houndstooth), « Everything is True ». Le 28.03 à Paris. lamachinedumoulinrouge.com

02-L'association rennaise Ay-Roop se penche sur le cirque des pays du nord et prend le pouls d'une scène extrêmement vivace. Pour son festival éponyme, elle convie les Finlandais Jani Nuutinen (Circo Aereo) et Olli Vuorinen, et les Suédois Magmanus et Sisters, entre bien d'autres. Du 8 au 12.04 à Rennes.ay-roop.com

03-Le collectif Le Paradoxe Animalier donnera à voir une flopée de jeunes gens admirables pour sa première soirée au Social Club, avec 8tm, Melja, Birol, Neana et Georgia Girls. Le 2.04 à Paris, et c'est gratuit. parissocialclub.com

04-Le festival biennal Itinéraires Graphiques de Lorient, poursuit sa route commencée le 1.03. Ce petit chemin, bien agréable, se compose d'expositions de Muzo, Placid, Laurent Lolmède, Jean-François Martin, Pascale Boillot, Philippe Roux et consorts. Jusqu'au 27.04. itinerairesgraphiques.lorient.fr

05-Le Festival Vie Sauvage souhaite mêler musique, graphisme et art de vivre. On ne peut que l'en féliciter d'autant qu'il touche juste dans ces trois domaines, avec Connan Mockassin, Babe, John & The Volta ou Be Quiet pour la musique, le collectif Poivre pour le graphisme et quelques bons Bordeaux Côte de Bourg pour le reste. Du 13 au 15.06 à Bourg-en-Gironde. festivalviesauvage.fr

06-Haste invite le vétéran de la techno underground espagnole, Oscar Mulero, fondateur de deux pimpantes maisons (Warm Up et Pole Group) et coupable de 20 ans d'une carrière sans faille. À ses côtés, Léome et les DJ's du collective Haste. Le 28.03 au Club Transbo, à Lyon. facebook.com/hastenights

n.f. (extravagans). Bizarrerie, incohérence,

folie. Ex : « Je ne suis pas fan de

l'extravagance pour l'extravagance » - Lady

Gaga. Se dit aussi de soirées ou d'événements durant lesquels la raison

n'a plus lieu d'être.

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[ F e s t i v a l ] . L'été arri-vant, les bourgeons bour-geonnant et les jeunes se dévêtant, la France se voit submergée de festivals musicaux jusqu'à l'étouf-fement. Sans vouloir forcé-ment tailler, il est vrai que bon nombre d'entre eux seraient, à tout le moins, dispensables. Quelques diamants brillent pourtant au milieu de la mélasse, et

Nuits Sonores pèse, à ce titre, un bon paquet de carats. Son poids risque d'augmenter d'autant plus avec cette 12e édition, peut-être la meilleure depuis sa naissance.D'aucuns appellent ça une apogée, d'autres un paroxysme, nous opterons pour un aboutissement. Le concert spé-cial de Kraftwerk, en fin de festival, est le symbole de cette édition où Nuits Sonores a su imposer une ligne artistique propre. Mêlant références personnelles et regard exigeant

sur le bouillonnement musical actuel, les programmateurs nous offrent ainsi un large éventail d'artistes aux origines et aux destinées diverses, mais tous représentants d'une cer-taine idée de la musique : l'intégrité. Bien sûr, il manquera toujours un tel ou un tel et il restera sans doute des scènes ignorées (on regrettera, par exemple, l'absence de la scène techno parisienne), mais que dire d'un line-up qui brasse Marcel Dettmann, Föllakzoid, Four Tet, Huerco S., Andy Votel, Daniel Avery, Legowelt, Shed, Oneothrix Point Never, Robert Hood, Suuns, Efdemin, The Ex, Marvin & Guy, Gold Panda, The Oscillation, Lee Ranaldo, Funkineven, Kosme, CLFT, PALMA, et bien d'autres que la place et le risque de lourdeur nous empêchent de nommer ? Que Nuits Sonores a parfaitement compris son rôle : celui d'un festival de référence, à qui il incombe de représenter toute la vitalité des musiques électroniques et indépendantes. Ce qu'il a fait, cette année, à merveille.• Nuits Sonores 2014, du 28.05 au 1.06 à Lyon. European Lab, 

le forum culturel initié par Arty Farty se déroulera du 27 au 

30.05, à Lyon également.

 www.nuits-sonores.com

Fig. 2 : une sAison grAPhique_

Fig. 1 : nuits sonores 2014_

[ F e s t i v a l ] . Cette année, et contre toute attente, la France est en fête. Joie, amour et cotillons sillonnent en effet nos vertes campagnes de Lorient à Paris, de Chaumont à Échirolles. Graphisme en France 2014 est en effet l'occasion de faire la lumière sur tous les événements et activistes du milieu graphique, fort vivace dans nos belles contrées. À l'année entière, nous donnerons nous l'avantage à une saison particulière : le printemps havrais. Celui-ci, en effet, préfère au banal réveil de la nature, le réveil de la création. Au vu de la sixième édition d'Une Saison Graphique, on peut dire que le graphisme s'est levé du bon pied.Comme à son habitude, le festival haut-normand laissera une large place aux expositions, cœur de son activité. Elle seront cette année encore au nombre de six, et cette année encore elles ont été choisies avec le meilleur goût. Ainsi retrouvera-t-on l'abécédaire graphique de Fanette Mellier, les tribulations aimables de Felix Pfäffli, les truculents illustrateurs du Magazine Georges, le style architecturale de Richard Niessen, l'OUvroir de LEcture POtentiel de Diane Boivin et la brillante sélection d'affiches du festival de Chaumont. En dehors de ces gemmes visuelles, Une Saison Graphique offre également aux festivaliers quelques activités animées au rang desquelles la kermesse graphique par Papier Machine et la soirée dédiée au label allemand Raster Noton seront à coup sûrs de grands et beaux moments. Une Saison Graphique qu'aucun nuage ne viendra gâcher.• Une Saison Graphique, du 5.05 au 27.06 au Havre.

 www.unesaisongraphique.fr ; www.graphismeenfrance.fr

n.m. (Nicolaus). Métal blanc brillant. Par extension, ce qui est propre, parfait. Ex : « J'ai toujours été nickel avec tout le monde » - Patrick Balkany. Se dit aussi de festival à la programmation irréprochable.

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Fig. 1 : chAumont 2014_

[ F e s t i v a l ] . En l'an de grâce 1990, alors qu'une guerre civile déchire le Libéria et qu'Octavio Paz obtient enfin le Prix Nobel de Littérature, le clinquant maire de Chaumont, Cyril Bourlon de Rouvre, lance officiellement la première édition du Festival de l'Affiche de Chaumont. Vingt-cinq ans après, la manifestation s'est étoffée, s'est ouverte au gra-phisme dans son entier et peut même se vanter d'être devenue internationale. C'est donc un événement au top de sa forme et en pleine maturité qui fêtera son quart de siècle en présence des graphistes et amateurs de tous les pays.En effet, qu'il est grand, qu'il est beau et bien costaud ce festi-val chaumontois. Dirigé de mains solides par Étienne Hervy, le Festival International de l'Affiche et du Graphisme de Chaumont se lance tout pimpant dans la célébration de son 25e anniversaire. Une édition exceptionnelle, donc, qui verra les expositions se mêler aux conférences, aux workshops et aux sacro-saints concours international (présidé par Ralph Schraivogel) et étudiant (présidé par Pierre Vanni) donnant eux-mêmes lieu à des expositions. À la désacralisée Chapelle des Jésuites pourrons-nous ainsi juger sur pièce les

3 projets d'Åbäke, Dexter Sinister et Our Polite Society, tous trois studios de graphisme indépendants. Les Silos accueil-leront quant à eux l'exposition phare du festival, Signes de la grande guerre, curatée par le pape Michel Wlassikoff et mise en bouche par Vincent Perrottet et Jean Schneider. Aux Subsistances, centre névralgique du festival, se chevauche-ront les expositions/concours sus-cités, des focus sur Felix Pfäffli (oui, l'auteur de notre couverture) et Kim Do-Hyung, ainsi qu'une rétrospective de 25 années de lauréats chau-montois. Ces highlights et mille autres pépites à découvrir lors d'un festival qui réenchante chaque année le graphisme.• Festival International  

de l'Affiche et du Graphisme  

de Chaumont, du 17.05 au 9.06  

à Chaumont. Remise des prix  

les 24 et 25.05.

 www.cig-chaumont.com

[ F e s t i v a l ] . Indéniablement, l'art est un être vivant. Doué de conscience, évoluant au gré de ses rencontres et amitiés, il réagit à l'environnement extérieur comme tout un chacun. Malade parfois, d'une santé éclatante souvent, l'art se doit de suivre quelques régimes pour garder la pêche. En terme de médecine artistique, le CNEAI (Centre National Edition Art Image) est un des docteurs à la technique la plus enthousias-mante. Sa cure favorite, le brassage transdisciplinaire et la confrontation avec les autres champs de la pensée humaine. Il appelle ça les Scénarios, et préconise une forte dose au début de chaque traitement : le Festival Island.Ainsi, et pour démarrer en fanfare son Scénario Printemps-Été, le CNEAI offre-t-il deux jours de performances, confé-rences et expositions les 5 et 6 avril au sein de son merveil-leux espace de Chatou, dans les Yvelines. Au programme de ce week-end intensif : un atelier autour de la réplique et de la relecture, fignolé par Stéphan Magnin, des lectures de Mathis Collins, des éditions Spector Books et de Fanny de Chaillé et Pierre Alféri, des conférences sur Jef Geys, sur l'Inextricable Ouvrage de Gérard Collin-Thiébaut, et enfin

moult performances par Nicolas Laferrerie, Antoine Dufieu ou encore Neil Beggs. Ceci, bien évidemment, dans le but d'annoncer la fournée d'événements du Scénario à suivre, au sein de laquelle nous retiendrons la foisonnante et collective We Get Lighter and Lighter : Episode 2, l'incongrue C'est aujourd'hui dimanche, tiens ma jolie maman, voilà des roses blanches, toi qui les aime tant de Jef Geys, ou encore la merveilleuse rétrospective de la maison d'édition Spector Books. Après ça, l'art devrait se porter comme un charme.• Festival Island #5,  

les 5 et 6.04. Scénario 

de Printemps-Été, du 5.04  

au 26.09, le tout au CNEAI  

à Chatou (78)

 www.cneai.com

Fig. 2 : FestivAL isLAnd #5_

n.f. (patta). Membre d'un animal quadrupède. Par analogie,

membre de l'homme. Se dit aussi de l'habileté, de la touche

d'un artiste. Ex : « J'ai une patte de ouf avec les meufs » - François Hollande. Se dit aussi de structures dont on apprécie la façon de faire, l'intelligence

de programmation.

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n.m. (sanguis). Fluide corporel indispensable à la vie humaine. Race, extraction, famille, enfants par rapport à leurs parents. Goûts, disposition innée. Ex : « Le pouvoir, j'ai ça dans le sang » - Viktor Ianoukovitch. Se dit aussi de certaines personnes ou labels qui ont la musique dans le sang.

Fig. 2 : humAnist sk FestivAL _

[ m u s i q u e ] . Dans le précé-dent numéro, nous glosions déjà sur les activités mélo-manes du label parisiano-gessien Humanist Records. Mais ces fines oreilles ont également à cœur de faire parvenir les musiques qu'ils aiment au public le plus large. C'est pourquoi, à l'heure où le printemps fait rage, tiennent-ils chaque année le très conseillé Humanist Records Festival.

Cette année, rebelote, mais avec une légère différence : l'asso-ciation avec l'excellent label lyonnais SK Records.Le festival se renomme donc Humanist SK Festival en l'hon-neur des deux maisons qui vont donner à voir et à entendre quelques groupes du meilleur acabit. Célébrant la culture

DIY et indépendante, le Humanist SK se garde pourtant de tout esprit de chapelle. Son seul et unique objectif reste de diffuser de la musique de qualité peu ou pas connue par une grande partie de la population. De la drone à la pop, en passant par la chanson, le rock ou la musique électronique, Humanist SK brasse un maximum de genre pour n'en cap-ter que la crème. Paris et Lyon – puisque c'est dans ces deux villes que se déroulera le festival – auront donc la chance d'accueillir Plapla Pinky, Deux Boules Vanille, Wooden Indian Burial Orchestra, Zennth, Hrair Ratchian, William Parker Solo, Bel Arxé Lu ou encore Radikal Satan. Et, comme un symbole de cette intégrité, Humanist SK orga-nisera également une exposition en hommage à Moondog, père spirituel de ces mélomanes éclairés. Un bon festival, c'est aussi simple que de la bonne musique.• Humanist SK Festival, du 11 au 17.06 à Paris,  

du 18 au 21.06 à Lyon.

 skrecords.org ; humanistrecords.com

[ m u s i q u e ] . Il y a un Bordelais qui commence sérieusement à faire des vagues ces derniers mois : Fils Unique. Étienne, de son vrai nom, exerce depuis seulement un an et réussit pour-tant là où beaucoup d’autres échouent, attirer notre attention. Et autant dire que dans cet apport incessant de nouveautés, la tâche n’est pas aisée.Parcours exemplaire, Fils Unique choisit d’auto-produire une trilogie d’ EPs. Le pre-mier, Foggy Lagoon, révélé l’été dernier le place automatiquement dans la catégorie des artistes à suivre et voit même son titre "Foggy Lagoon" être repris par de nombreux sites comme un des hits de l’été. Il faut avouer que l’EP est accrocheur, des sonorités résolument modernes, alliant avec brio divers genres pour une harmonie globale singulière et directement identifiable. La patte Fils Unique est née.S’ensuit un second opus, Spare Time In Space Time, en jan-vier dernier, et force est de constater qu’il ne nous a pas déçu.

On retrouve bel et bien ses sonorités breakées armées de synthés ambiance French House qui produisent un ensemble ultra cohérent et novateur.Enfin du frais.Oui car Fils Unique fait aujourd’hui malheu-reusement un peu figure d’exception. Il n’est pas aussi seul que son nom peut le laisser prétendre mais la jeune génération française peine à percer malgré des exemples tel que Fakear ou encore Darius qui poussent les

portes de l’international. Mais Fils Unique a un petit truc qui le met à part, comme une volonté propre à sa musique qui viendrait nous chatouiller une partie bien précise de notre cortex pour ne plus nous lâcher pendant un moment. Car oui, Fils Unique est assez addictif, vous verrez.Robin Thomas pour allinelectro.com

• À venir, un nouvel EP début Juin 

En concert le 25 avril à Lyon pour la Team Fasola.

 soundcloud.com/filsunique ; allinelectro.com

Fig. 1 : FiLs unique_

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Vue par Marion Fayolle

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•printemps

2014

—CULTURE  VISUELLE  

& VISION  

CULTURELLE  

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